Mme M., 70 ans, vous appelle car depuis ce matin, sans effort particulier, elle souffre de lombalgies intenses et ne peut plus se lever de son lit. Elle a pour antécédent récent une pseudo-polyarthrite rhizomélique traitée depuis 6 mois par 15 mg/j de prednisone. À l’examen, la patiente est en bon état général mais ne peut se tourner sur le plan du lit. Elle n’a aucun déficit neurologique, ni troubles sphinctériens. La percussion du rachis lombo-sacré est douloureuse. La manœuvre de Lasègue est négative. Compte tenu de son incapacité fonctionnelle et de son isolement social, vous décidez de l’hospitaliser.
Le bilan d’entrée révèle : NFS normale, VS : 43/70, créatininémie : 92 micromoles/l, calcémie : 2,48 mmoles/l, phosphorémie : 0,86 mmoles/l. Électrophorèse des protéines sériques et bilan thyroïdien normaux. Vitamine D (25 OH D3) : 12 ng/ml.
Les radiographies, fortement parasitées par un iléus réflexe, étant difficilement interprétables, une IRM dorso-lombaire est pratiquée. Celle-ci montre une fracture vertébrale de type ostéoporotique de L5, sans infiltrat tissulaire pathologique, se manifestant par un hyper-signal en séquence STIR ( = séquence de saturation de graisse) du corps vertébral (Voir Figure 1).
LE DIAGNOSTIC LE PLUS PROBABLE
Une rachialgie de survenue brutale chez une femme âgée, avec impotence fonctionnelle marquée, doit faire évoquer en premier lieu une fracture vertébrale. L’étiologie la plus fréquente est l’ostéoporose post-ménopausique. Un antécédent de corticothérapie générale au long cours doit être aussi recherché systématiquement (ostéoporose cortisonique). La carence en vitamine D est fréquemment associée à la déminéralisation osseuse, en aggrave les conséquences, tout en en modifiant les modalités thérapeutiques. Les endocrinopathies doivent aussi être recherchées et en premier lieu l’hyperthyroïdie et l’hyperparathyroïdie (ostéoporoses secondaires).
LES DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS
-› Si l’origine osseuse des rachialgies est au premier plan des étiologies possibles, l’ostéoporose, primaire ou secondaire, doit rester un diagnostic d’élimination. Il faut évoquer les causes malignes de déminéralisation osseuses, d’où l’intérêt d’un bilan biologique minimum (NFS, VS, électrophorèse des protéines, calcémie) devant toute fracture vertébrale non traumatique. La fracture peut être révélatrice d’un myélome (électrophorèse des protéines) ou d’une métastase osseuse, notamment d’un cancer du sein (syndrome inflammatoire, hypercalcémie). Il faut insister à ce propos sur la difficulté, dans certains cas, de différencier les étiologies bénignes et malignes. L’imagerie par résonance magnétique nucléaire peut alors être utile en montrant un infiltrat tissulaire pathologique orientant immédiatement vers la malignité.
-› En cas d’impotence fonctionnelle très marquée, l’autre diagnostic étiologique à évoquer, plus rarement, est celui de spondylodiscite infectieuse (Voir encadré 1). Le contexte est souvent évocateur, antécédent infectieux récent ou manœuvre instrumentale infectiogène (chirurgie, biopsie, endoscopie). La fièvre peut manquer mais un syndrome inflammatoire important est de règle.
-› L’examen clé est l’IRM qui montre un hyper-signal en T2 du disque et des vertèbres adjacentes.
DES ÉTIOLOGIES VARIABLES SELON L’ÂGE
-› À l'âge moyen, la pathologie discale est nettement dominante. Dans ce cas, l’impotence fonctionnelle est, en général, moindre (pas de syndrome fracturaire) et il y a fréquemment une irradiation radiculaire, sciatique ou crurale, associée. L’examen du rachis montre une contracture vertébrale asymétrique, il y a un signe de Lasègue ou de Léri et parfois un déficit sensitivo-moteur ou une anomalie des réflexes ostéo-tendineux. L’imagerie, par scanner ou IRM, objective une hernie discale et un conflit radiculaire.
-› La pathologie vertébrale du sujet âgé est dominée par les complications fracturaires de la fragilité osseuse. L’importance du handicap fonctionnel, contrastant avec l’état antérieur du sujet, doit alerter. L’ostéoporose post-ménopausique est la cause la plus fréquente mais une ostéoporose secondaire, en particulier endocrinienne ou cortisonique, doit être systématiquement recherchée. Dans quelques cas, la fragilité osseuse est liée à un infiltrat tissulaire pathologique (maladies de la moelle osseuse hématopoïétique, cancer secondaire des os).
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