INTRODUCTION
Lorsqu’une femme commence une contraception comme un DIU ou une méthode hormonale, une consultation de suivi lui est généralement demandée. Cette visite a pour but de vérifier la tolérance (par exemple les saignements ou les céphalées) ou les éventuels effets indésirables. La visite de retour demande temps et ressources tant pour la femme que pour le praticien. Mais est-elle réellement nécessaire ? Sinon, quelle surveillance optimale est à proposer ?
EN RÉSUMÉ
• Il n’y a pas à être particulièrement inquiet lors de la surveillance d’une femme sous contraception. On propose une prise de la pression artérielle annuelle chez les femmes sous œstroprogestatifs lors du renouvellement. Un questionnement sur les migraines peut être fait, tout comme sur l’apparition d’une autre pathologie pouvant contre-indiquer les œstroprogestatifs, comme un adénome hépatique ou un antécédent familial au premier degré thrombo-embolique avant 50 ans (2).
• Le bilan biologique systématique n’a plus lieu d’être et est remplacé par un simple bilan glucidolipidique à réaliser après l’instauration chez les femmes ayant des facteurs de risque cardio-vasculaires.
• Sur le plan gynécologique, on peut ajouter :
- Le dépistage annuel du Chlamydia Trachomatis chez les femmes sexuellement actives de moins de 25 ans.
- Le frottis cytologique cervico-utérin à partir de 25 ans, puis 1 an après,
puis tous les 3 ans.
- Puis à partir de 30 ans, le dépistage des HPV à haut risque tous les 5 ans.
SURVEILLANCE DES OESTROPROGESTATIFS
→ La pression artérielle Un des arguments pour la visite de suivi sous œstroprogestatif est le contrôle de la pression artérielle (PA). Il semble effectivement que la pression artérielle puisse être augmentée à un an chez ces femmes (1). En cas d’hypertension, il s’agit alors d’une contre-indication aux œstroprogestatifs, même si celle-ci se retrouvait corrigée sous traitement. Une surveillance annuelle de la contraception avec la prise de la pression artérielle est donc une bonne pratique à conserver.
→ Les migraines Les œstroprogestatifs sont contre-indiqués lors des migraines avec aura ou lors des migraines sans aura associées à d’autres facteurs de risque, comme l’âge supérieur à 35 ans ou le tabagisme (2). Puisqu’une consultation annuelle est recommandée pour la pression artérielle, il s’agira de poser la question de l’apparition ou de la recrudescence des épisodes migraineux pouvant inviter à un changement contraceptif.
→ Le bilan biologique Le bilan biologique « classique » glucidolipidique n’est pas utile en population générale (3) ni lors de l’instauration d’une contraception œstroprogestative, ni lors du suivi. En effet, le pourcentage de femmes ayant un bilan perturbé est faible (environ 2 %). Les femmes ayant un bilan perturbé sans autre facteur de risque ne présentent par ailleurs pas d’augmentation des évènements artériels, qu’elles aient ou non une contraception œstroprogestative (4). Si bien que l’OMS (cf. tableau 1) ne considère plus les anomalies glucidolipidiques comme une contre-indication aux œstroprogestatifs(2).
→ La prise de poids Aucune contraception à ce jour n’a fait la preuve d’une prise de poids, notamment les œstroprogestatifs (5). Il n’est donc pas nécessaire de faire revenir les femmes pour les peser. Cependant, s’agissant d’une inquiétude pour certaines d’entre elles, le poids pourra être noté dans le dossier à titre de rassurance (cf. tableau 1).
→ Une consultation de suivi est-elle nécessaire ? Oui, une visite de suivi annuelle est utile et suffira pour vérifier la pression artérielle (cf. tableau 1), sauf élément nouveau comme des maux de tête atypiques. Chez les femmes ayant des facteurs de risque (obésité, tabac, évènement artériel ou veineux au 1er degré (père, mère, frère, sœur) avant 50-60 ans, âge > 35 ans, migraine), un bilan glucidolipidique peut-être demandé après instauration d’un œstroprogestatif, car la combinaison d’un bilan perturbé à un facteur de risque serait alors une contre-indication aux œstroprogestatifs.
SURVEILLANCE DES DIU AU CUIVRE OU AU LÉVONORGESTREL
La surveillance des femmes ayant un dispositif intra-utérin (DIU) au cuivre ou au lévonorgestrel (Mirena®, Kyleena® ou Jaydess®) est basée intuitivement sur le risque infectieux et les complications mécaniques liées à la pose du DIU.
→ Le risque infectieux Le risque d’infection génitale haute est prédominant dans les six premières semaines pour ensuite revenir à celui de la population générale d’environ 1,4 ‰ (6). Il n’est donc pas logique de faire une visite annuelle dans ce sens chez les femmes porteuses de DIU. Cependant, il faut informer les femmes qu’une consultation est souhaitable en cas de douleurs pelviennes persistantes dans les premières semaines suivant la pose d’un DIU.
→ L’expulsion Les femmes sous DIU ont un risque d’expulsion relativement faible, généralement dans les trois premiers mois (7). La surveillance annuelle perd donc particulièrement de son intérêt dans ce contexte, car si l’expulsion doit avoir lieu, il est probablement un peu tard. Les conseils sont donc exactement les mêmes que pour le risque infectieux.
→ La perforation Elle est détectée en moyenne 306 jours après la pose du DIU (8). Par ailleurs, la perforation est un évènement très rare : moins de 2 ‰ des cas. En l’absence de symptôme, il est donc très peu probable qu’une visite de routine précoce soit utile pour dépister cet évènement rare.
→ Une consultation de suivi est-elle nécessaire ? En population générale, la visite de suivi n’est pas nécessaire (9). Elle pourra s’envisager chez les adolescentes du fait d’un risque d’expulsion plus important. Si une visite de suivi est indiquée, elle pourra avoir lieu en cas d’effet secondaire ou de problème lié au dispositif.
SURVEILLANCE DE L’IMPLANT CONTRACEPTIF
L’implant contraceptif à l’étonogestrel (Nexplanon®) est une contraception progestative. Comme il n’y a pas de risque augmenté cardio-vasculaire, la surveillance est donc principalement centrée sur les problèmes liés à la pose et la gestion des effets indésirables de cette famille de contraception.
→ Les problèmes liés à la pose Les poses profondes sont heureusement rares, mais peuvent engendrer des complications vasculonerveuses, voire une migration par voie veineuse jusqu’au poumon dans environ 4 cas pour 100 000 (10). Depuis janvier 2020, le site de pose a été modifié dans le but de limiter les complications de ce type. Il se situe désormais entre 8 et 10 cm de l’épitrochlée et entre 3 et 5 cm en postérieur du sillon bicipito-tricipital (cf. figure 1). Les recommandations sont d’expliquer à la femme où se situe l’implant, le faire palper après la pose et de vérifier régulièrement son bon positionnement (11). Dans ce contexte, une visite de suivi n’a pas d’intérêt particulier.
→ La gestion des effets indésirables Les saignements utérins anormaux sont la principale cause de retrait de l’implant à l’étonogestrel. Cependant, il n’y a pas d’étude ayant permis de montrer un intérêt à une visite de rassurance, ce d’autant qu’il n’y a pas de traitement efficace contre ce type de saignement. Concernant la prise de poids, elle suit les recommandations des œstroprogestatifs. En effet, à ce jour, il n’existe pas de preuves tangibles de prise de poids sous contraception progestative seule (12).
→ Une consultation de suivi est-elle nécessaire ? Il n’y a pas de raison particulière à un suivi chez les femmes ayant eu une pose d’implant contraceptif à l’étonogestrel. La femme doit être informée de la position de l’implant, doit l’avoir palpé juste après la pose puis régulièrement.
SURVEILLANCE DES PROGESTATIFS ORAUX
Les progestatifs oraux ne présentent pas non plus d’augmentation du risque veineux ou artériel. Cependant, ils ne peuvent être prescrits plus d’un an.
Une consultation de suivi à un an est donc nécessaire pour renouveler l’ordonnance. On pourra alors demander si la tolérance est bonne avec le profil de saignement (métrorragies, aménorrhée), la présence de céphalées, de syndrome douloureux mammaire ou d’acné.
Bibliographie
1. Steenland MW, Zapata LB, Brahmi D, Marchbanks PA, Curtis KM. The effect of follow-up visits or contacts after contraceptive initiation on method continuation and correct use. Contraception. mai 2013;87(5):625‑30.
2. WHO | Medical eligibility criteria for contraceptive use [Internet]. WHO. [cité 11 déc 2016]. Disponible sur: http://www.who.int/reproductivehealth/publications/family_planning/MEC-…
3. Linet T. Consultation en contraception. RPC Contraception CNGOF. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2018;46(12):792‑8.
4. Tepper NK, Steenland MW, Marchbanks PA, Curtis KM. Laboratory screening prior to initiating contraception: a systematic review. Contraception. mai 2013;87(5):645‑9.
5. Lindh I, Ellström AA, Milsom I. The long-term influence of combined oral contraceptives on body weight. Hum Reprod Oxf Engl. juill 2011;26(7):1917‑24.
6. Vidal F, Paret L, Linet T, Tanguy le Gac Y, Guerby P. Contraception Intra-utérine : Recommandations pour la Pratique Clinique du CNGOF. Gynecol Obstet Fertil Senol. 2018;46(12):806‑22.
7. Madden T, McNicholas C, Zhao Q, Secura GM, Eisenberg DL, Peipert JF. Association of age and parity with intrauterine device expulsion. Obstet Gynecol. oct 2014;124(4):718‑26.
8. van Grootheest K, Sachs B, Harrison-Woolrych M, Caduff-Janosa P, van Puijenbroek E. Uterine perforation with the levonorgestrel-releasing intrauterine device: analysis of reports from four national pharmacovigilance centres. Drug Saf. 1 janv 2011;34(1):83‑8.
9. Curtis KM. U.S. Selected Practice Recommendations for Contraceptive Use, 2016. MMWR Recomm Rep [Internet]. 2016 [cité 10 mai 2017];65. Disponible sur: http://www.cdc.gov/mmwr/volumes/65/rr/rr6504a1.htm
10. Simon C, Maurier A, Gaboriau L, Vrignaud L, Dayani P, Vaillant T, et al. Incidence and characteristics of intravascular pulmonary migration of etonogestrel implants: A French nationwide study. Contraception. sept 2020;102(3):186‑9.
11. Creinin MD, Kaunitz AM, Darney PD, Schwartz L, Hampton T, Gordon K, et al. The US etonogestrel implant mandatory clinical training and active monitoring programs: 6-year experience. Contraception. févr 2017;95(2):205‑10.
12. Vickery Z, Madden T, Zhao Q, Secura GM, Allsworth JE, Peipert JF. Weight change at 12 months in users of three progestin-only contraceptive methods. Contraception. oct 2013;88(4):503‑8.
13. Réévaluation de la stratégie de dépistage des infections à Chlamydia trachomatis [Internet]. Haute Autorité de Santé. [cité 2 nov 2020]. Disponible sur: https://www.has-sante.fr/jcms/c_2879401/fr/reevaluation-de-la-strategie….
14. Workowski K, Bolan G. Sexually Transmitted Diseases Treatment Guidelines, 2015. MMWR Recomm Rep. 2015;64(June 5, 2015):1‑337.
Liens d'intérêts
Pour cet article, l’auteur déclare être consultant pour les laboratoires MSD, Gedeon-Richter, CCD.
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