Clément, 16 ans, consulte car il éprouve une gêne au niveau de sa joue gauche apparue brutalement à la partie basse de sa mâchoire gauche. Il pense que c'est en relation avec une infection dentaire, mais, en l’examinant plus précisément, nous remarquons au niveau de la muqueuse jugale interne gauche un orifice très inflammatoire au centre duquel on retrouve du pus (photo 1). En fait, il s’agit de l’obstruction du canal de Sténon, et notre jeune patient souffre d’une parotidite aiguë d’origine bactérienne.
ANATOMIE ET TERMINOLOGIE
➔ La loge parotidienne, de forme pyramidale de sommet supérieur, est comprise entre :
- en avant, la branche montante de la mandibule ainsi que le muscle masséter ;
- en arrière, le conduit auditif externe, et le muscle sterno-cléido-mastoïdien ;
- au niveau de la partie supérieure, la partie postérieure de l’arcade zygomatique ;
Cette loge contient la glande parotide qui est parcourue par le canal salivaire excréteur de Sténon. Ce canal, au trajet horizontal, se termine au niveau de la muqueuse jugale interne au-dessus de la 2e molaire.
Cette structure abrite l’artère carotide externe, le réseau veineux parotidien et le nerf facial.
➔ Une pathologie inflammatoire des glandes salivaires peut être observée, il s’agit alors d’une sialite. Si l’atteinte est centrée sur le parenchyme de la parotide, on utilise le terme de sialadénite. A contrario, si la pathologie inflammatoire concerne le canal salivaire, on parle de sialodochite. Néanmoins, cette différenciation reste théorique, car souvent il existe des atteintes à la fois canalaires et parenchymateuses.
LES CAUSES DE PAROTIDITES
En ce qui concerne les parotidites aiguës, trois origines sont classiquement décrites.
➔ La parotidite virale. La plus rencontrée reste la parotidite ourlienne. Cette dernière se caractérise par une période d’incubation avoisinant 3 semaines. Le patient allègue une gêne à la mastication, une otalgie et une fièvre plus ou moins importante.
En phase d’état, on objective une parotidite qui se caractérise par une tuméfaction douloureuse, unilatérale au départ, et devenant secondairement bilatérale (en 2 ou 3 jours). Le plus souvent le lobule de l’oreille est refoulé, ce qui induit un comblement du sillon rétromaxillaire et donne une déformation piriforme du visage. La palpation des glandes parotidiennes est douloureuse et les glandes ont une consistance ferme et gélatineuse. En examinant la cavité buccale, on remarque la présence d’une turgescence au niveau de l’orifice de Sténon qui présente un caractère inflammatoire. Une orchite, une pancréatite, une méningite, une myocardite, une atteinte des nerfs crâniens peuvent compléter ce tableau.
On évoque ce diagnostic devant la mise en évidence d’autres cas dans l’entourage. Néanmoins, depuis la réalisation d’une vaccination de la population vis-à-vis de cette affection, cette pathologie est devenue rare.
À côté des parotides ourliennes, d’autres causes virales peuvent être évoquées. Elles sont secondaires à des entérovirus, des coxsackies, au virus d’Epstein Barr et, aussi, au cytomégalovirus.
➔ La parotide lithiasique suppurée. On la rencontre plus fréquemment au niveau de la glande sous-maxillaire. Dans ce cas, on note une douleur au début du repas (phénomène favorisé par la sécrétion salivaire induite par la prise d’aliments). Le meilleur outil diagnostique reste l’échographie qui peut objectiver cette lithiase. La sialographie risque d’induire une aggravation de l’infection (elle est contre-indiquée dans ce cas) et le scanner peut être utile pour observer des lithiases de petite taille.
➔ La parotidite aiguë microbienne. Le plus souvent, il s’agit d’une sialadénite secondaire d'origine buccale. Cependant une origine hématogène est également possible (extension d’une affection du voisinage). Elle survient le plus souvent chez des patients adultes qui présentent une altération de l’état général : déshydratation, alcoolisme chronique, suite d’intervention chirurgicale au niveau du pharynx, diabète). Cliniquement, on observe une douleur qui survient lors du repas ; douleur mandibulaire favorisée par la mastication. En parallèle, il existe un train fébrile.
On remarque aussi un œdème au niveau de la région parotidienne qui provoque une ascension du lobule de l’oreille. L’orifice du canal de Sténon est inflammatoire et on peut observer la présence d’un écoulement de pus. Celui-ci peut être provoqué par une pression effectuée à proximité de l’orifice du canal. Le traitement repose sur une antibiothérapie de type amoxicilline-acide clavulanique. Elle peut être associée à une corticothérapie en cas de douleurs.
LE CAS DE CLÉMENT
En interrogeant Clément avec plus de précision, nous apprenons qu’il a perdu beaucoup de poids ; 5 kg en 3 mois, sans qu'il modifie son régime alimentaire. Depuis plus de 2 mois il ne cesse de boire (du fait d’une soif intense). Un contrôle glycémique est alors effectué ; lequel permet d’observer la présence d’une glycémie à 5 g/l.
En conséquence, la parotide de Clément a permis de mettre en lumière un diabète de type 1 pour lequel il est actuellement traité par insuline.
Bibliographie
1- Reyt E. Diagnostic d’une tuméfaction parotidienne. http://www-sante.ujf-grenoble.fr/SANTE/corpus/disciplines/orl/couglsali….
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Ed. Cambridge University Press 2008.
5- Wilson KF, Meier JD, Ward PD. Salivary Gland Disorders. American Family Physician 2014; 89 (11): 882-888.
Liens d'intérêts : aucun
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