Le Dr Richard Faitg, anesthésiste à Thonon-les-Bains

Des professionnels de santé s’organisent contre la pollution de l’air dans la vallée de l’Arve

Publié le 12/05/2020
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Le collectif Environnement santé 74 réunit des médecins, des infirmiers ou encore des sages-femmes. Il vise à sensibiliser et former l’opinion publique et surtout les soignants sur les maladies liées à la pollution.

Crédit photo : AFP

« Il ne faut pas que la médecine soient en retard sur les enjeux de santé publique liés à la pollution de l’air », dit Richard Faitg, anesthésiste à Thonon-les-Bains. La pollution de l’air est le 5e facteur de risque pour la santé après la malnutrition, les risques alimentaires, l’hypertension artérielle et le tabagisme. Admettant une conversion « tardive et progressive », Richard Faitg s’est d’abord intéressé aux phénomènes liés à l’électrosensibilité puis s’est rapproché du collectif Air pur, une association de lutte contre la pollution de l’air dans la vallée de l’Arve, un mal persistant au pied du Mont Blanc.

Convaincu que le « médecin, et l’ensemble des soignants, ne sont pas que des acteurs du soin mais des experts qui doivent aussi porter un message de prévention », il a réuni en septembre 2018 des infirmiers, des médecins ou encore des sages-femmes au sein du collectif Environnement Santé 74, relais en Haute-Savoie de l’association Santé Environnement France. Leur objectif principal est de sensibiliser et d’informer les professionnels de santé à la prévention, au diagnostic et à la prise en charge des maladies liées aux multiples polluants dans l’environnement. Il s’agit également de partager les informations et informer les citoyens sur ces enjeux.

Le rôle central des soignants

Pour faire passer leur message, les membres du collectif prônent l’éducation en informant et en sensibilisant le public, les politiques  et les professionnels de santé. Selon sa spécialité, chaque membre intervient sur demande, dans des réunions publiques, des débats ou lors de la projection de films. « Seul, le médecin ne peut rien » insiste le Dr Richard Faitg, d’où l’intérêt de réunir des soignants de tous les horizons qui partagent et relaient les messages et leurs expertises auprès de la population. Le terrrain d'action de ces soignants militants va au-delà la qualité de l'air. Ils proposent notamment d’interdire les pesticides à une échéance courte, la fin du développement de la 5G ou encore entamer une démarche de décroissance, « c’est-à-dire moins consommer, moins rouler et faire plus de marche à pied ou de vélo ».

« Il faut intégrer ces réflexes de société et de défense de l’environnement dans notre vie de tout les jours », estime Richard Faitg qui, dans le contexte du confinement, soutient ainsi la Convention citoyenne pour la sortie de crise. Chaque jour, la parole médicale et scientifique doit faire de la prévention et faire prendre conscience des enjeux. « Le médecin est souvent crédible et le plus à même de porter ce message à travers la prévention, l’écoute et la prise de position. « La prévention est la meilleure médecine, juge Richard Faitg, car elle touche tout le monde et ne coûte rien ». Cette parole s’adresse aussi aux politiques car ils « n’ont pas toujours les connaissances scientifiques suffisantes. D’ailleurs, on ne leur demande pas de faire de la médecine ou de l’agriculture mais de faire la synthèse et de décider avec les connaissances acquises ».

Un travail de longue haleine

Malgré leur activisme, les membres du collectif se désolent du désintérêt des décideurs pour ces questions d’environnement. « On privilégie l’économie au détriment de la santé de la population », déplore le médecin. Les différents plans lancés pour réduire la pollution dans la vallée de l’Arve « sont à pleurer par rapport à l’évidence, juge-t-il, et je n’ai, pour le moment, rencontré aucun politique venu me voir pour discuter de ces enjeux ».

Pas question pourtant de relacher la pression. « On a conscience qu’on n’a pas réussi à faire passer tous ces messages mais qu’on va y arriver. Il faut une forme d’entêtement, on ne baisse pas les bras ». Ce sont les initiatives individuelles et les prises de paroles répétées qui vont faire évoluer la situation. « C’est un marathon, mais on ne lâche rien ». Les actions du collectif dépassent désormais les frontières de la Haute-Savoie et servent de modèle. « J’ai été contacté par une généraliste de la région lyonnaise qui avait entendu parler de nous et voulait faire la même chose dans sa région ».


Source : Le Quotidien du médecin