Violences conjugales, des signes d’appel indirects

Publié le 07/12/2018
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Crédit photo : GARO/PHANIE

En France, près d’une femme sur dix en couple serait victime de violences conjugales. « Nous en avons donc forcément dans notre patientèle », souligne le Dr Mathilde Vicard-Olagne (Clermont-Ferrand) qui intervenait sur ce thème lors du congrès.

Pour autant, le « dépistage » systématique de ces violences suscite encore des réticences. Une alternative pourrait être de « poser la question sur signe d’appel », comme le propose cette généraliste auvergnate qui a conduit une méta-analyse et une revue de la littérature sur les manifestations cliniques « indirectes » les plus souvent associées à ces violences en soins primaires.

Selon ce travail, quatre grands tableaux cliniques sont spécialement présents, au premier plan desquels les troubles psychiatriques. Près de quatre fois plus fréquente qu’en population féminine tout-venant (OR 3,75), la dépression est particulièrement corrélée à ces violences mais aussi la consommation de psychotropes, les conduites suicidaires et les addictions.

À côté de ces tableaux psychiques, les plaintes douloureuses et la consommation d’antalgiques ressortent aussi comme fortement associés aux violences conjugales dans cette étude.

De même pour les troubles d’ordre gynécologique type infections ou IST (OR global à 2,6) qui peuvent témoigner de violences sexuelles conjugales, avec par exemple la mainmise du conjoint sur le contrôle de la procréation, le refus du préservatif malgré des comportements à risque, etc. « Tabou parmi les tabous, le viol dans le couple reste peu reconnu par la société, et encore moins par les femmes qui en sont victimes », souligne le Dr Vicard-Olagne.

Des patientes qui « énervent »

Si ces plaintes peuvent être la conséquence directe des violences subies, ce sont le plus souvent des “tableaux cliniques écrans”. « En général, les femmes ne peuvent pas révéler les violences qu’elles subissent car l’agresseur les empêche de parler en les culpabilisant. » D’où la multiplication de plaintes en apparence “banales”.

Dans cette étude, la forte demande de soins et le nombre de symptômes par consultation ressortaient d’ailleurs comme le quatrième facteur prédictif clinique de violences conjugales. « Ce sont souvent des patientes qui énervent, car elles consultent de façon répétée, avec une longue liste de symptômes, en rajoutent au cours de la consultation, etc., reconnaît le Dr Vicard-Olagne. Mais c’est peut-être lorsqu’on on est agacé qu’il faut justement s’interroger. »

Oser poser la question

Plus généralement, la généraliste incite à « oser poser la question » devant ces tableaux cliniques évocateurs « qu’on voit quotidiennement au cabinet ». Pour aider les médecins à venir en aide aux victimes, le site declicviolence.fr propose documentation et informations pratiques.

Bénédicte Gatin

Source : lequotidiendumedecin.fr