Les données de l’enquête européenne (ESEMeD) réalisée en 2008 montrent que les médecins généralistes (MG) sont les premiers prescripteurs de psychotropes avec une part de 25 à 30 % de leurs consultations pour motif psychiatrique (rapport INSERM 2012). 88 % des Français déclarent avoir un médecin traitant, généraliste pour 99,5 % d’entre eux. Les patients déclarent consulter leur MG en première intention. La moitié des patients souffrant de dépression ont consulté exclusivement leur MG (25 % si la dépression était sévère). De facto, ceci place le MG au cœur du système.
De plus, les patients souffrant de maladies psychiatriques ont une espérance de vie diminuée de 10 à 20 ans avec des risques de mortalité notamment du fait de troubles physiques. Le dernier plan de santé mentale 2011-2015 insistait sur ce point demandant d’organiser « une réponse en présence d’une non-demande ».
Collaboration insuffisante
Malgré différentes recommandations de la Haute Autorité de santé (prise en charge de l’épisode dépressif majeur en médecine générale, échange de courriers entre les médecins généralistes et les psychiatres), la collaboration semble insuffisante et insatisfaisante. Les MG estiment manquer de formation, de temps et doutent de l’utilité des échelles d’évaluation pourtant recommandées. Ils se plaignent de difficultés pour adresser leur patient auprès des spécialistes, en particulier dans certaines régions. Le développement d’un travail plus collaboratif pourrait permettre de répondre, en partie à ces difficultés.
Le principe d’un réseau de soins en santé mentale serait alors de permettre au patient d’avoir recours en premier à leur MG et faciliter pour ce dernier l’accès à un avis spécialisé. Le psychiatre intervient alors dans la mise en place d’un projet de soins comprenant un protocole de soins des actions médicamenteuses et non médicamenteuses.
Formation et partage d'informations
Prenons l’exemple de la dépression. Le MG intervient en premier lieu pour le repérage et adresse au médecin psychiatre pour confirmation du diagnostic et proposition d’un protocole de soins formalisés. La surveillance rapprochée pourrait alors incomber au MG et le psychiatre n’intervient que dans une surveillance plus spécifique : modifications et arrêt de traitement, information et/ou éducation thérapeutique.
Ce type de collaboration a une valeur de formation et de partage d’informations, au bénéfice du patient. Cela implique une réactivité de la part des psychiatres, qui ne sera possible que par une réorganisation du travail, plaçant le psychiatre à un niveau de recours et non plus de soins primaires. Dans ce système le psychiatre se place également en coordonnateur des soins spécialisés (infirmières en santé mentale, psychologues…).
Une expérience similaire avait été mise en place entre psychiatres et hépatologues au sein du réseau Hépatites 49. Un travail de recherche avait permis de déterminer un certain nombre de critères déterminant un adressage obligatoire au psychiatre. Ainsi, bon nombre de patients ont pu bénéficier d’un traitement avec un suivi adapté, sécurisé. Ceci a aussi permis aux médecins hépatologues d’acquérir une certaine « culture psychiatrique » et donc d’indiquer plus facilement des traitements, ce qu’ils n’auraient pas fait avant.
La même expérience a montré les mêmes effets dans une consultation spécialisée en neurogénétique. Petit à petit les neurologues ont acquis une expérience du maniement des psychotropes, ajustant leur demande de consultations psychiatriques dans les situations les plus complexes.
CHU d’Angers
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