Une situation dramatique

O U et quand, peu importe. Cette conversation est imaginaire et n'est donc ni située, ni situable. La scène peut donc être cet espace de secret qu'est le théâtre de l'Atalante, la femme peut porter cette longue robe de satin blanc et avoir jeté dessus une écharpe de laine un peu incongrue, l'homme peut être en noir et une chaise suffire à toute scénographie. Mais autant l'avouer, on attendait autre chose de la mise en scène d'un texte notamment monté par Jacques Nichet. Loyon lui-même, qui vient de signer un bon travail sur le « Isma » de Nathalie Sarraute, avait déjà, à Besançon, proposé une version scénique de ce « Silence de Molière », écrit par l'Italien Giovanni Macchia et publié en Français aux éditions Desjonquères dans une belle et fidèle traduction de Camille Dumoulié et Jean-Paul Manganaro.

Ici - mais c'est peut-être faiblesse d'un soir - rien de ce qui fait le pathétique désarmant de l'héroïne n'affleure. Rien ne nous touche de ce que dit, rétive, réservée, Esprit-Madeleine à son jeune interlocuteur, qui serait auteur dramatique et admirateur de Molière. François Noury, partition brève, mais juste présence dans l'écoute, tient son rôle sobrement. Mais l'on est déçu par l'absence de Chantal Mutel qui n'a pas été dirigée fermement, n'a pas cherché en elle la profondeur désespérée qu'il aurait fallu donner à cette femme sans âge, sans passé, sans avenir, cette voix qui parle d'un homme grand dont se dessine, en creux, le portrait. Ainsi monté, montré, joué, on ne peut saisir les enjeux de ce texte pourtant aussi déroutant que passionnant, ce beau texte énigmatique qui demeure noué autour de son mystère.

A l'Atalante, à 20 h 30, du lundi au samedi, sauf mardi, et le dimanche à 16 h 30. Durée : 1 h 20 (01.46.06.11.90). Le texte de la traduction de Camille Dumoulié et Jean-Paul Manganaro est publié aux éditions Desjonquères.