Suivi du cancer de la thyroïde : la TSH recombinante représente un progrès majeur

Publié le 29/01/2001
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L ES cancers de la thyroïde sont en augmentation, 2 500 nouveaux cas de cancer de la thyroïde sont diagnostiqués chaque année en France dont 2 000 chez les femmes et 500 chez les hommes, ce qui correspond à une incidence de 2 à 3/100 000.

Le pronostic du cancer de la thyroïde différencié est habituellement bon (90 % de survie à dix ans) au prix d'une surveillance régulière par scintigraphie à l'iode radioactif tous les ans pendant trois ans, puis à cinq ans et à dix ans, tout en surveillant le taux de thyroglobuline tous les six mois.
Le traitement est dans un premier temps chirurgical, thyroïdectomie totale, suivie, six semaines plus tard, par l'administration de fortes doses d'iode radioactif pour détruire les résidus tissulaires du cancer qui auraient échappé à la chirurgie.
Un traitement médical au long cours par les hormones thyroïdiennes est indispensable chez les patients thyroïdectomisés, à la fois comme traitement substitutif et pour freiner, supprimer la sécrétion hypophysaire de TSH.

La TSH recombinante humaine

Les cellules thyroïdiennes cancéreuses conservant le pouvoir de capter l'iode et la capacité de produire la thyroglobuline, le contrôle du traitement et la détection des rechutes tumorales reposent sur le dosage de la thyroglobuline et la scintigraphie du corps entier à l'iode radioactif.
Or, un taux élevé de TSH (50 m U/l) est nécessaire pour la fixation de l'iode et pour la production de thyroglobuline par les cellules cancéreuses. Jusqu'à maintenant, pour obtenir ce taux, les patients devaient être sevrés en hormones thyroïdiennes pendant au moins quatre semaines avant les examens, avec, comme conséquence, la survenue d'une hypothyroïdie dont les effets délétères étaient mal tolérés par les patients et pouvaient être la cause d'arrêt de travail.
Le recours à la TSH recombinante humaine (rhTSH Thyrogen des Laboratoires Genzyme) transforme complètement cette situation.
L'administration par voie intramusculaire d'une ampoule de rhTSH dosée à 0,9 mg de thyrotropine-alpha deux jours de suite, cinq jours avant les examens de contrôle, sans supprimer les hormones thyroïdiennes, permet d'obtenir un taux élevé de TSH tout en évitant les troubles liés à l'hypothyroïdie, comme le confirment les résultats de l'étude présentée par le Pr Leclère (service d'endocrinologie, CHU Brabois, Nancy) au Congrès de la Société européenne de médecine nucléaire (EANM).
Cette étude multicentrique (quatre centres français : Angers, Clermont-Ferrand, Nancy et Reims) a été conduite chez 138 patients suivis régulièrement (dosage de la thyroglobuline, scintigraphie à l'iode 131) après traitement d'un cancer de la thyroïde.

Angers, Clermont-Ferrand, Nancy et Reims

Les patients ont été séparés en deux groupes : un groupe off-T4, avec un sevrage en hormone thyroïdienne pendant plusieurs semaines avant les examens ; un groupe TSH recombinante.
Les différences entre les deux groupes ont été évaluées sur différents paramètres : le taux de TSH plasmatique, l'asthénie classée en quatre stades - de 0 à 4 en fonction de son intensité -, le score de Billewicz*, le nombre de jours d'arrêt de travail et leur coût.
Le taux de TSH était de 84 mU/l dans le groupe off-T4 contre 152 mU/l dans le groupe rhTSH-d3.
L'asthénie atteignait un score de 2,28 dans le groupe off-T4 contre 0,15 dans le groupe TSH recombinante.
Le score de Billewicz était de 17 dans le groupe off-T4 contre 0,32 sous rhTSH.
Le nombre de jours d'arrêt de travail chez 69 patients du groupe off-T4 a été de 876 jours contre 70 dans le groupe TSH recombinante.

Qualité de vie

Ces résultats montrent que la TSH recombinante humaine permet d'obtenir des taux de TSH supérieurs à ceux d'un sevrage sans en avoir les effets délétères. Son utilisation représente donc un progrès majeur en terme de qualité de vie pour les patients qui doivent se soumettre à une surveillance régulière pendant plusieurs années, d'autant qu'elle est bien tolérée, et en terme de coûts sociaux.

Conférence de presse en présence du Pr Jacques Leclère (CHU de Nancy), et Michael le Bayle (Laboratoires Genzyme).
*L'échelle de Billewicz évalue les symptômes d'hypothyroïdie (diminution de la sudation, peau sèche, intolérance au froid, prise de poids, constipation, enrouement...). Chaque symptôme est côté de 0 à 2, le score total est établi en faisant le calcul des points cumulés.
Thyrogen® des Laboratoires Genzyme, délivré sous ATU de cohorte, est réservé aux services hospitaliers.

Dr Micheline FOURCADE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6845