La greffe rénale sans corticoïdes

Résultats de l'étude HARMONY

Publié le 13/04/2017
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L'étude allemande HARMONY était randomisée, et doublement contrôlée, avec ou sans corticoïdes, avec ou sans induction déplétante. Le traitement d'entretien comportait du mycophénolate mofétil et du tacrolimus à faible dose (résiduel entre 6 et 10 ng/ml avant le 3e mois, puis entre 3 et 8 ng/ml). Il est très important de noter que la population d'étude était à bas risque immunologique : parmi les 587 patients analysés, 99 % étaient caucasiens, et 88 % n'avaient aucun anticorps anti-HLA. Enfin, le temps d'ischémie froide a été particulièrement court (moins de douze heures en moyenne). Dans ce contexte, les principaux résultats de l'étude HARMONY sont les suivants :

- en définissant le diabète selon les critères de l'American Diabetes Association, l'incidence du NODAT (New Onset Diabetes After Transplantation) à un an était de 39,2 % dans le bras conventionnel (induction par basiliximab, et maintien des corticoïdes) : ce chiffre est important, et indique à quel point l'incidence réelle du diabète post-transplantation est sous-estimée ;

- le sevrage en corticoïdes n'a pas été associé à une augmentation du risque de rejet aigu, dont l'incidence à un an était de l'ordre de 10 %. Quel que soit le traitement d'induction, plus de 80 % des patients ont pu être sevrés sans évènement indésirable ;

- le type de traitement d'induction (basiliximab versus thymoglobuline) ne semble pas influencer l'incidence du rejet aigu, critère principal de l'étude (ce qui est discordant d'une large étude précédente (3), mais la dose moyenne de sérum antilymphocytaire des limites réellement administrée a ici été relativement basse : 4,6 mg/kg).

Les limites

Cette étude est encourageante mais il faut noter trois limites importantes :

1. le critère de jugement est précoce (12 mois) et l'étude ne montre pas de bénéfice clinique, cardiovasculaire par exemple ;

2. il n'y avait pas de biopsies de surveillance et l'on ne peut donc pas exclure que le sevrage en corticoïdes ne soit associé à des phénomènes de rejet encore infracliniques avant un an ;

3. le rejet humoral chronique étant aujourd'hui considéré comme la première cause de perte du greffon au long cours, la comparaison entre les groupes d'étude de l'immunisation anti-HLA avec le temps sera déterminante pour établir la juste sécurité du sevrage en corticoïdes.

Hôpital Tenon, Paris
(1) Thomusch O et al. Lancet 2016;388:3006-16
(2) Kasiske BL et al. Kidney Int 2010;77:299-311
(3) Brennan DC et al. N Engl J Med 2006;355:1967-77

Pr Alexandre Hertig

Source : Bilan Spécialiste