U N an après le feu vert du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, les réseaux gérontologiques expérimentaux de la Mutualité sociale agricole (MSA) ont recueilli l'adhésion de plus de 80 % des médecins généralistes ruraux qui pouvaient être concernés.
Trois cent trente-deux généralistes (sur un potentiel de 380) ont déjà intégré ces réseaux qui se sont mis en place progressivement, entre avril et novembre 2000, sur 19 sites en milieu rural (voir encadré).
En revanche, seulement un tiers d'entre eux ont commencé à faire adhérer des personnes âgées. Résultat : les réseaux gérontologiques promus par le régime agricole d'assurance-maladie ne comptent que 200 patients alors qu'ils ont pour objectif d'en inclure 1 000 à terme (sur une population potentielle de 5 000 personnes, tous régimes d'affiliation confondus). « Aujourd'hui, ces réseaux connaissent une montée en charge, explique Daniel Lenoir, directeur général de la caisse centrale du régime agricole. L'objectif peut être atteint dès lors qu'il y a une dynamique locale avec les autres régimes d'assurance-maladie et les conseils généraux » [dont dépendent les travailleurs sociaux, NDLR] .
Divergence d'appréciation
Les caisses locales de la MSA, dont les affiliés sont plus âgés que la moyenne, et a fortiori plus dépendants en zone rurale, se mobilisent pour promouvoir ces réseaux gérontologiques, mais les caisses primaires du régime général « ont moins d'allant », selon Daniel Lenoir. La Caisse nationale d'assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAM) serait notamment opposée au cumul des forfaits dus aux généralistes ruraux, à savoir : le forfait annuel de 300 francs par patient en tant que médecins référents et leur rémunération forfaitaire versée par le réseau gérontologique (3C la première année, puis 115 F les années suivantes). Pour la MSA, « les deux forfaits sont cumulables, dans la mesure où le suivi est plus important dans le cas d'une personne dépendante ». A ce sujet, Daniel Lenoir espère trouver bientôt une solution avec la CNAM.
De façon plus générale, le directeur général de la caisse centrale du régime agricole évoque une « divergence d'appréciation avec la CNAM sur le rôle des expérimentations ». Lors de la conférence inaugurale du dernier MEDEC, le directeur de la CNAM, Gilles Johanet, s'est montré méfiant à l'égard des réseaux : il a souligné que « la logique d'expérimentation mène à une logique de la dérogation et donc à une logique d'inflation » (« le Quotidien » du 15 mars).
Les encouragements d'Elisabeth Guigou
Fort des encouragements d'Elisabeth Guigou en janvier dernier, à l'occasion du « Grenelle de la santé », la MSA poursuit le développement de réseaux similaires dans plusieurs régions afin que le test soit significatif. « Nous préférons garder l'optique d'expérimentation au niveau national pour pouvoir en tirer des conclusions et faire des propositions à nos partenaires conventionnels », précise Daniel Lenoir.
Par ailleurs, la MSA estime que, à partir des bilans initiaux systématiques, « les réseaux gérontologiques doivent aider à améliorer la connaissance de la dépendance ».
Par exemple, en prenant en charge les matériels habituellement non remboursables, les réseaux permettent de dresser un inventaire des accessoires indispensables au maintien à domicile : matelas anti-escarres, appareil relève-dos, couverts incassables, barres d'appui pour baignoires, sièges de douche, tapis antidérapant, etc.
Daniel Lenoir considère que le projet gouvernemental d'allocation personnalisée d'autonomie (APA) n'est « pas abouti ». Il est certes satisfait qu' « une notion chère à la MSA ait été reprise dans le projet de loi sur l'APA » (examiné ce mois-ci au Parlement), en l'occurrence le plan d'aide individualisé prévu pour chaque personne dépendante, englobant les soins et le social. Mais la MSA aurait souhaité la création d'un cinquième risque au sein de la Sécurité sociale. Enfin, selon Daniel Lenoir, il est nécessaire d' « affiner la grille AGGIR », qui permet de déterminer le degré de dépendance de la personne âgée en fonction de six niveaux appelés « groupes GIR ». « Il est clair qu'il faudra faire évoluer la grille sur les critères médicaux et l'environnement des personnes âgées », conclut le directeur général du régime agricole, rappelant que « le handicap résulte de la rencontre d'une déficience et d'un environnement ».
Dix-neuf sites ruraux répartis sur douze régions
Les réseaux gérontologiques de la Mutualité sociale agricole (MSA) sont expérimentés sur 19 sites locaux en milieu rural, répartis sur 12 régions, au total.
Ces réseaux visent à favoriser le maintien à domicile des personnes âgées de plus de 60 ans, tout en améliorant la qualité des soins et en maîtrisant les coûts ambulatoires et hospitaliers.
Le médecin généraliste assure la coordination de la prise en charge sanitaire et sociale de la personne âgée. Au moment de son intégration au réseau, chaque patient bénéficie d'un bilan initial en deux parties : un bilan gériatrique effectué par le généraliste pendant une journée à l'hôpital de proximité et un bilan social réalisé par l'assistante sociale au domicile de la personne âgée. Ce bilan initial débouche sur un plan d'intervention sanitaire et social élaboré lors d'une réunion de coordination. Une réunion similaire se tient ensuite chaque année pour réévaluer le plan d'intervention.
Outre la tarification habituelle des actes médicaux, le médecin généraliste reçoit une rémunération forfaitaire de 3 C par patient la première année de son adhésion au réseau (pour le bilan gériatrique initial, sa participation à la réunion et à l'élaboration du plan) et 1 C les années suivantes (pour sa fonction générale de coordination et de suivi de l'ensemble des interventions).
Le réseau prévoit aussi des rémunérations forfaitaires par patient pour les infirmières (6,5 AMI, leur lettre clé) et les masseurs-kinésithérapeutes (8,25 AMK, leur lettre clé).
Les patients bénéficient, quant à eux, d'un remboursement de leurs soins à 100 %, de la dispense d'avance des frais, ainsi que d'une prise en charge de produits, matériels et accessoires normalement non remboursables par l'assurance-maladie, dans la limite de 600 francs par mois.
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