Prise en charge des thromboses veineuses chez le patient cancéreux

Publié le 02/04/2001
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PRATIQUE

• Hypercoagulabilité
La survenue d'un cancer est un facteur de risque de thrombose en induisant un état d'hypercoagulabilité, en comprimant les trajets veineux, en obligeant le patient à s'aliter. Le traitement chirurgical, le traitement médical (hormonothérapie, chimiothérapie) et la pose d'un accès veineux central à demeure sont aussi des facteurs majorant ce risque.

• Parfois héparinorésistance
Le traitement anticoagulant par l'héparine peut être insuffisant, avec dissociation entre la valeur de l'héparinémie et le chiffre du TCA, conduisant à parler d'héparinorésistance. Cette résistance semble liée à une augmentation franche du fibrinogène et du facteur VIII. Le traitement anticoagulant par antivitamine K est plus difficile à conduire chez le patient cancéreux. Il est observé un taux de récidive plus élevé (trois fois plus), ainsi qu'une plus grande fréquence des accidents hémorragiques (trois à quatre fois plus). Il ne semble pas que la multiplication du contrôle de l'INR soit capable de réduire ces taux de récidive et de saignement. Dans ce contexte, la poursuite d'un traitement par héparine de bas poids moléculaire apparaît souvent préférable, et ce d'autant que la tinzaparine ou la nadroparine peuvent s'administrer à raison d'une injection toutes les vingt-quatre heures. Les héparines de bas poids moléculaire ne doivent cependant pas être utilisées en cas d'insuffisance rénale avec baisse de la clairance de la créatinine (mesurée ou estimée par exemple par la formule de Cockroft) à moins de 30 ml par min.

• Prolonger le traitement
La durée du traitement doit être plus prolongée chez le patient cancéreux : en effet, en cas de persistance de la tumeur, la libération de facteurs procoagulants par les cellules cancéreuses persiste. La poursuite du traitement médical favorise la survenue de récidives, et limite la mobilité du patient. Le traitement anticoagulant est prescrit tant que le cancer est présent, et tant que le traitement anticancéreux est administré. Lorsque le patient présente un risque hémorragique important, les alternatives à la poursuite d'un traitement par antivitamine K (ciblant une augmentation de l'INR entre 2 et 3) peuvent être discutées : maintien d'un INR à 2, traitement par héparine de bas poids moléculaire, pose d'un filtre interrompant le flux dans la veine cave.

• Au total
Le traitement anticoagulant est plus difficile à conduire chez le patient cancéreux. Il est observé une héparinorésistance, et sous antivitamine K un taux de récidive plus élevé, ainsi qu'une plus grande fréquence des accidents hémorragiques. La durée du traitement doit être plus prolongée chez le patient cancéreux, probablement tant que le cancer est présent, et tant que le traitement anticancéreux est administré.

Dr Jean-Michel RODIER Service de médecine, Centre de lutte contre le cancer René-Huguenin, Saint-Cloud.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6890