Pour ou contre les NACO ? Sans surprise, le débat transdisciplinaire sur ce thème a fait salle comble à Nice, témoignant des nombreuses incertitudes et questions que les généralistes se posent face aux nouveaux anticoagulants oraux (NACO).
Pour le Dr Jean Pierre Laroche (médecine vasculaire, CHU de Grenoble) comme pour le Dr Joël Cogneau (médecin généraliste à Saint-Avertin et directeur scientifique de l’IRMG), la simplification des modalités de traitement constitue un bon point pour les NACO. De fait, l’absence d'interférences alimentaires et d’adaptation posologique, le moindre nombre d’interactions médicamenteuses rendent l’anticoagulation plus simple pour le patient. Pour le prescripteur les choses sont un peu plus complexes, « on pensait avoir des médicaments pour lesquels les doses seraient à peu près fixes et reproductibles. Mais les schémas thérapeutiques sont finalement relativement compliqués et varient en fonction des molécules, des indications et de la phase de traitement », pondère le Dr Gilles Pernod (médecine vasculaire, CHRU de Montpellier).
Moins de saignements intracrâniens
Autre atout des NACO, une efficacité comparable à celle des AVK « avec dans la vraie vie un peu moins de saignements intracrâniens », indique le Dr Laroche en s’appuyant sur les résultats d’un travail publié début 2013 (Journal de l'American College of Cardiology).
Ces résultats rassurants sont à mettre en balance avec d’autres publications retrouvant davantage d’hémorragies digestives sous dabigatran 150 ou rivaroxaban par rapport aux AVK. Ils contrastent également avec certaines données de pharmacovigilance colligées aux États-Unis où le nombre d’événements hémorragiques déclarés sous NACO se révèle bien plus élevé qu’avec la warfarine (Southworth MR. NEJM 2013). Mais selon le Dr Paul Frappe (généraliste et chef de clinique, université Jean-Monnet, Saint-Etienne), « l’excès d’événements déclarés n’est pas forcément le reflet d’un réel sur-risque. Il peut aussi être bien dû à des prescriptions hors AMM ou au fameux “effet Weber” » (tendance à « surdéclarer » les effets secondaires des nouveaux médicaments par rapport à ceux des anciennes molécules). Pour l’heure, l’ANSM ne recense que des effets indésirables connus à des taux attendus.
À côté de cette question majeure des effets indésirables, le Dr Joël Cogneau pointe d’autres bémols comme le manque d’expérience des médecins pouvant favoriser des mésusages, la nécessaire adaptation des posologies à la fonction rénale ou encore l’absence d’antidote. Même si, comme le souligne le Dr Laroche, « nombreux sont les médicaments dans le même cas ».
Le coût des NACO (plusieurs euros par jour contre 22 centimes pour la coumadine ) peut aussi sembler prohibitif mais doit être pondéré par les économies induites par l’abandon de l’INR et la diminution des hospitalisations attendues sous NACO. Et puis, l’absence de suivi biologique suscite désormais moins d’enthousiasme, faisant craindre une moins bonne observance.
Pour une utilisation raisonnée
Devant ce tableau mitigé, les intervenants plaident pour une utilisation raisonnée des NACO tout en rappelant qu’il ne faut pas remplacer un traitement AVK bien équilibré par un NACO. Un point de vue très proche de celui exprimé fin juillet par la Haute Autorité de santé qui indique que, pour la fibrillation auriculaire, « les anticoagulants oraux antivitamine K restent le traitement de référence, les autres anticoagulants oraux représentant une alternative ».
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