S I la maladie de Parkinson affecte principalement le contrôle moteur, elle atteint également les fonctions cognitives et sensorielles. Parmi les troubles sensoriels, le déficit olfactif a été le plus étudié. Les patients ont du mal à détecter, identifier et discriminer les odeurs. Ces troubles sont si fréquents qu'ils peuvent avoir une valeur diagnostique dans la maladie de Parkinson.
L'olfaction requiert un processus sensori-moteur complexe. Schématiquement, il faut humer (aspirer de l'air par le nez) et sentir. Humer, composante motrice, consiste à transporter le stimulus aérien jusqu'aux récepteurs olfactifs. Sentir consiste à traduire le stimulus odorant en signal neurologique et à transporter ce signal vers le cortex.
On a toujours pensé que les troubles olfactifs des parkinsoniens était liés à une diminution de l'aptitude à sentir, du fait d'un déficit en neurotransmetteurs ; d'autant que les études post mortem ont montré la présence de corps de Lewy dans le cortex olfactif.
L'équipe de Noam Sobel (université de Californie) a imaginé que, peut-être, la compostante motrice, c'est-à-dire l'inaptitude à humer, était en fait en cause des troubles. Pour cela, les chercheurs ont conduit des tests chez 20 patients ayant une maladie de Parkinson typique traitée et 20 sujets contrôles.
Trois types de tests ont été réalisés : identification des odeurs ; seuil d'identification ; flux aérien nasal.
Pour l'identification des odeurs, les sujets ont été soumis au test UPSIT (University of Pennsylvania Smell Identification Test) qui consiste à gratter un papier, puis à sentir quarante odeurs différentes. L'examinateur grattait et le patient sentait.
Pour le seuil de détection, on a utilisé des tests à la vanilline et à l'acide propionique qui permettent de tester le système olfactif (vanilline) et le système trigéminé (acide propionique). Différentes dilutions étaient présentées aux patients.
Pour ce qui est du flux aérien, les sujets portaient un masque nasal couplé à une source odorante et à un pneomatotachographe qui permettait de transmettre des variations de pression à un amplificateur. Vingt-quatre préparations odoriférantes étaient, par le masque, présentées aux patients à trois concentrations différentes (faible, intermédiaire et forte).
Enfin, pour contrôler les performances motrices, on demandait aux sujets de frapper avec l'index sur une table le plus de fois possible en dix secondes et le test était répété quatre fois.
Des problèmes à tous les tests
Sans entrer dans les détails, les résultats sont nets :
- erreurs à tous les tests d'olfaction ;
- réduction des capacités à humer.
Pour déterminer si la capacité à humer était liée aux performances olfactives, les auteurs ont étudié la relation entre le volume de l'inspiration nasale et les performances olfactives mesurées par UPSIT. Ils ont trouvé une corrélation significative entre ces mesures (p = 0,009) : un volume plus élevé est prédictif d'une meilleure performance olfactive. Enfin, chez les patients ayant les moins bonnes performances, le fait d'accroître l'inhalation (en demandant de renifler fortement) améliore les performances olfactives (p < 0,05).
Les méfaits de la privation olfactive
« Nous montrons que la capacité à humer est altérée dans la maladie de Parkinson », concluent les auteurs, qui sont toutefois prudents : « Nos résultats ne suggèrent pas que ce trouble est la seule cause du déficit olfactif dans la maladie de Parkinson. Accroître le volume de l'inhalation n'a aidé que ceux qui avaient les plus mauvaises performances mais ne leur a pas permis de retrouver des performances normales. L'autre composante du déficit olfactif est vraisemblablement un trouble du "sentir" lié à des lésions dans le système olfactif. Ce dégât neuronal peut être le résultat du processus pathologique de la maladie de Parkinson non lié à l'inhalation. D'un autre côté, ce dégât en lui-même pourrait être le résultat d'une inhalation altérée. » En effet, comme l'expliquent les auteurs, le système olfactif est hautement sensible à la privation olfactive. Par exemple, chez les rats, la réduction du flux aérien dans les narines entraîne des lésions extensives et une détérioration dans le système olfactif. « Ainsi, un déficit de l'inhalation pourrait constituer une forme de privation olfactive qui, à son tour, conduit à la dégradation du système olfactif. » Dès lors, si la perte de la capacité à humer était la cause des troubles olfactifs (ce qui n'est qu'une spéculation), cela remettrait en question l'origine des lésions observées dans le cortex olfactif des parkinsoniens.
« Proc Natl Acad Sci USA » du 27 mars 2001, pp. 4154-4159.
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