A PRES avoir brandi, il y a quelques semaines, la menace d'une contestation tarifaire (« le Quotidien » du 2 mars) pour protester contre le niveau « indigne » de la valeur des actes de médecine générale (consultation et visite), l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF), première organisation de généralistes, a décidé de « passer à l'action ».
Président de l'UNOF, le Dr Michel Chassang annonce le lancement, « dans les prochains jours », d'une campagne de communication qui invitera les généralistes à utiliser massivement l'arme du droit à dépassement exceptionnel (DE) « dans des conditions très précises et sur la base d'une étude juridique ».
Des « consignes pratiques claires » appelant les médecins à utiliser le DE « à bon escient » seront données aux généralistes. Une campagne d'affichage est également prévue. Si le DE est théoriquement réservé pour les cas où le patient formule une exigence particulière, le Dr Chassang affirme que les médecins de famille pourraient en fait l'appliquer « beaucoupplus largement » qu'ils ne le font actuellement, tout en restant dans les limites de la loi. Il cite déjà « les consultations effectuées en dehors des plages horaires habituelles d'ouverture des cabinets » ou encore « les nombreux cas où un patient non grabataire appelle son médecin pour une visite à domicile ».
« Casus belli »
Pessimiste ( « la concertation n'existe pas, le gouvernement fait de la diversion »), le président de l'UNOF redoute également les conséquences pour les généralistes de la publication imminente de l'objectif de dépenses déléguées (ODD) pour 2001, autrement dit l'enveloppe gérée exclusivement par la CNAM qui comprend les dépenses d'honoraires des médecins et autres professionnels de santé ainsi que les dépenses de laboratoires d'analyses et de transports sanitaires. Le gouvernement vient de transmettre l'ODD aux caisses d'assurance-maladie afin qu'elles puissent boucler leur nouveau rapport d'équilibre sur les honoraires des professions de santé et proposer, éventuellement, des baisses de la valeur des actes médicaux. Si le dernier rapport d'équilibre a épargné les médecins généralistes (mais pas les spécialistes) le Dr Chassang se prépare, cette fois, au pire. « Le peu d'empressement que le gouvernement a mis pour transmettre l'ODD 2001 nous fait craindre un objectif extrêmement contraignant et impossible à tenir », explique-t-il.
Le président de l'UNOF met donc en garde les caisses et le gouvernement contre les conséquences qu'aurait l'annonce d'une baisse des tarifs. Mais cette éventualité semble peu probable, compte tenu de la dynamique actuelle de dialogue marquée par les discussions auxquelles participent, avec les médecins libéraux, les organisations gestionnaires de l'assurance-maladie.
« Si des mesures autoritaires frappant les honoraires des généralistes devaient être prises et touchant les indemnités de déplacement ou le C, l'UNOF considérerait qu'il s'agit d'une déclaration de guerre totale et elle donnerait alors des consignes extrêmement dures pour la population, allant bien au-delà de la contestation tarifaire », annonce le Dr Chassang. L'UNOF ne souhaite pas, pour l'instant, préciser les modalités de sa riposte mais il pourrait s'agir d'un appel à la grève des visites de nuit, menace que le syndicat de généralistes a déjà brandie.
Enfin, l'UNOF continue (en tant que branche généraliste de la CSMF) de plaider pour une grande manifestation nationale de l'ensemble des professions de santé à Paris, le 12 juin prochain, pour protester contre le système « absurde et débile » de maîtrise des dépenses. Pour l'instant, le Centre national des professions de santé (CNPS), qui appelle à cette journée d'action du 12 juin, n'en a pas encore arrêté définitivement les modalités, de nombreuses voix plaidant pour des actions décentralisées. « Je pense qu'il faut frapper très fort, comme en 1991, affirme le Dr Chassang. Or, dans un pays aussi jacobin que le nôtre, c'est Paris qui marque les esprits. » Il assure toutefois que son syndicat se pliera à la décision majoritaire arrêtée par le CNPS. « Nous ne ferons pas bande à part mais nous avons une obligation de résultats. Chacun doit bien y réfléchir. »
L'ODD fixé à 149.9 milliards pour 2001
Elisabeth Guigou a fixé à 149.9 milliards l'ODD(objectif des dépenses déléguées) pour 2001, soit 9.5 milliards de plus qu'en 2000.L'ODD établit le montant des dépenses des professions de santé libérales et sa gestion est assurée par la CNAM.Rappellons que l'ONDAM (objectif des dépenses d'assurance-maladie, fixé par le Parlement)s'élève à 693.3 milliards, soit une progression de 3.5 % par rapport aux dépenses de 2000.
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