Dans le traitement de l’endométriose

Les ultrasons focalisés à haute intensité (HIFU), une nouvelle arme

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Publié le 18/05/2017
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endométriose

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Crédit photo : PHANIE

L’endométriose, maladie chronique, touche deux femmes sur dix en âge d’avoir des enfants, soit entre 5 à 10 % des Françaises.

La maladie se caractérise par la présence de muqueuse utérine en dehors de l’utérus, et dans 1 cas sur 5, l’atteinte se situe aussi vers le rectum, ce qui engendre des diarrhées/constipation, d’impétueux besoins d’aller à la selle, des douleurs lors des rapports sexuels.

Après échec des traitements médicamenteux, une intervention chirurgicale longue est proposée (entre 3 à 6h), difficile par cœlioscopie ou par laparotomie, dérivation digestive (poche/anus artificiel) dans 5 à 10 % des cas, compte tenu des risques de fistule entre l’intestin et le vagin. Cette opération nécessite une hospitalisation de 7 à 10 jours, assortie d’un arrêt de travail prolongé d’environ 6 semaines.

Depuis 18 mois, le Pr Gil Dubernard, gynécologue et chef du service de gynécologie obstétrique de l’Hôpital de la Croix-Rousse des Hospices Civils de Lyon (HCL) utilise des ultrasons focalisés à haute intensité (HIFU). Le Pr Dubernard a, pour cela, eu l'idée de détourner l’appareil Focal One de son indication première : le traitement du cancer de la prostate. La procédure est pour le moment évaluée dans le cadre d’un protocole de recherche clinique. « L’étude, validée par l’ANSM, consiste à traiter par ultrasons des zones très localisées chez 10 patientes âgées de plus de 25 ans (plus de 35 ans avant élargissement du cadre), sans projet de grossesse dans les trois mois qui suivent la procédure. Toutes les patientes doivent avoir une endométriose profonde symptomatique, après échec des traitements médicamenteux », eplique le Pr Dubernard. Le procédé présente de nombreux avantages, à commencer par la durée de l’opération : entre 3 à 4 minutes, mais aussi l’absence de complications, et l'immobilisation réduite de la patiente, qui peut repartir de l’hôpital dès le lendemain.

45 000 traitements sur la prostate

Sur le plan plus technique, une sonde est tout d’abord insérée par voie vaginale destinée au repérage de la zone à traiter. Le nodule va alors être découpé en différents étages, puis modélisé en 3D. Après quoi, les équipes mettent de l’eau au niveau du rectum et du nodule endométriosique dans un ballonnet réfrigéré. Ce dernier sert à diminuer la chaleur produite par les ultrasons, évite le risque de fistule et rend possible la diffusion des ultrasons. Cela va également permettre d’établir la corrélation entre le volume de la lésion et le nombre de lignes de tirs nécessaires au moment de l’opération (15 tirs par étage en moyenne). La patiente, placée sous anesthésie locorégionale, rentre la veille à l’hôpital, et reste deux heures en salle de réanimation après lui avoir retiré la sonde urinaire. Les ultrasons, 10 000 fois plus élevés que la normale, visent à dévitaliser le nodule à une température comprise entre 85 et 95° sur une zone très localisée, afin de provoquer la nécrose des cellules endométriques et des vaisseaux concernés. La procédure, robotisée, repose sur une expertise de traitements par ultrasons depuis 1992 de la prostate et sur certaines tumeurs. Pour l’équipe des HCL, il s’agit de « l’avenir de la prise en charge de l’endométriose ». L’objectif de cette étude est double, localiser la lésion d’une part, traiter et améliorer les conditions symptomatiques des patientes d’autre part. D’autres applications sont d’ores et déjà envisagées, pour le cancer du sein notamment et en gynécologie. Pour l’heure, cinq patientes ont été traitées, et n’ont pas eu de complications. Une diminution significative de la symptomatologie douloureuse sans aucun traitement médical (hormonal ou autre) depuis la procédure a été observée. Il reste donc cinq patientes à inclure dans le programme, selon les facteurs limitant établis. 

Guillaume Bouvy

Source : Le Quotidien du médecin: 9582