«P OURQUOI devrais-je exercer la même spécialité toute ma vie ? », s'étonne le Dr Thierry Ktorza. Ce médecin diplômé en chirurgie générale a terminé ses études après la mise en œuvre de la loi du 23 décembre 1982. Contrairement à ses confrères diplômés avant cette date, il ne peut, en vertu de cette loi, avoir accès aux commissions de qualification, dépendant du Conseil de l'Ordre, qui permettent de faire reconnaître officiellement les compétences acquises dans un autre domaine que la spécialité d'origine.
Pour ce médecin dit du « nouveau régime », la seule façon d'obtenir une nouvelle qualification de spécialiste consisterait à refaire un cursus de médecine générale, auquel s'ajouteraient plusieurs années d'études correspondant à la spécialité visée. Inimaginable pour des praticiens déjà installés. « Je pratique la chirurgie plastique exclusive depuis trois ans. Il n'est pas normal que je ne puisse pas demander à bénéficier de ce titre, estime le Dr Ktorza. Le système actuel m'empêche de défendre mon dossier devant une commission. Cela me semble une discrimination par rapport aux médecins de l'ancien régime ou aux médecins étrangers. »
Faute de qualification officielle, les médecins comme lui se heurtent à la méfiance des patients et même au barrage de la commission médicale d'établissement de certaines cliniques. Cette situation est difficilement acceptable, lorsque l'on est certain de disposer d'un solide Curriculum vitae.
Le cas du Dr Ktorza n'est pas isolé. « Cela fait presque vingt ans que nous réclamons que les médecins nouveau régime puissent passer devant les commissions de qualification », explique-t-on au Conseil de l'Ordre, qui est intervenu auprès du ministère pour que la loi de modernisation sociale (votée en première lecture par les députés et que les sénateurs doivent examiner à la fin du mois) prévoit des passerelles entre spécialités. Il semble avoir été entendu. Dans sa version actuelle, le projet de loi de modernisation sociale indique que des décrets en Conseil d'Etat devront déterminer « les conditions dans lesquelles les personnes autorisées à exercer la médecine en France peuvent obtenir la qualification de spécialiste ». Il prévoit également des décrets pour déterminer « les modalités selon lesquelles les médecins (...) ayant exercé pendant au moins trois ans leur activité professionnelle peuvent accéder à une formation de troisième cycle des études médicales différente de leur formation initiale ». « Les compétences acquises sont prises en compte pour la durée et le déroulement de ces formations », précise le texte. Ainsi, il pourrait être demandé au candidat d'effectuer un stage de troisième cycle dans la spécialité demandée. Mais « si la commission estime que le médecin dispose d'acquis suffisants, elle n'exigera pas forcément de formation complémentaire », commente-t-on chez Bernard Kouchner.
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