Déremboursement des AASALs

Les arthrosiques handicapés

Publié le 21/09/2015
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Le quotidien des patients est durablement perturbé, par la douleur

Le quotidien des patients est durablement perturbé, par la douleur
Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

L’arthrose constitue le premier motif de consultation après les maladies cardiovasculaires en France, première cause d’arrêts de travail et de maladies professionnelles, première cause d’incapacité fonctionnelle après 40 ans, touche 10 millions de personnes. Elle coûte 3 milliards d’euros à l’Assurance maladie, les AASALs (que prenaient 1,5 million de personnes) représentant 0,8 % de cette dépense. Le déremboursement en mars dernier des anti-arthrosiques symptomatiques d’action lente (AASALs) était censé permettre des économies. Ont-ils été à la hauteur des espérances comptables de l’assurance-maladie

« Rien n’est moins sûr », estime Stéphane Billon, économiste de la santé. L’expérience passée (en 2010) de baisse du taux de remboursement des AASALs de 35 à 15 % avait montré que dans la vraie vie, le report de médicaments s’était fait à près de 80 % vers les AINS dont on connaît les effets secondaires, gastriques et cardiovasculaires. Avec un surcoût à la clé puisqu’il s’agit de médicaments remboursés.

L’impact budgétaire des restrictions de remboursement est ainsi largement minoré faute d’évaluation des conséquences de la désaffection vis-à-vis des AASALs.

« Ce dont on est sûr en revanche, rapporte le Dr Laurent Grange, rhumatologue et président de l’Association française de lutte anti-rhumatismale (AFLAR), grâce à l’enquête Stop Arthrose, c’est des effets de la maladie (car c’en est une !) sur le moral, la qualité de vie, les loisirs, etc. ». Le quotidien est durablement perturbé, par la douleur au premier chef et le sentiment de vieillir. Ils se disent mal soulagés, mal écoutés, mal suivis, et ce sentiment d’abandon a cru de façon exponentielle au déremboursement des AASALs.

Facteur d’immobilité

« Nous ne devons pas laisser nos patients seuls face à des choix liés à ce déremboursement, au risque qu’ils prennent sur des durées longues des médicaments inadaptés, ou ne se soignent plus, ne bougent plus, avec les conséquences que nous savons, sur l’arthrose en particulier », insiste-t-il.

L’arthrose est certes associée au handicap, mais aussi à un excès de mortalité, en ce qu’elle est devenue, par l’immobilité qu’elle entretient, un facteur de risque cardiovasculaire, souvent accompagnée de comorbidités cardiovasculaires. « Les AINS et sans doute le paracétamol, dont l’efficacité est d’ailleurs moindre que celle des AASALs sur la douleur chronique, contribuent à ce risque augmenté », prévient le Pr Pascal Richette (Hôpital Lariboisière). La seule vraie différence tient à la tolérance excellente des AASALs au long cours…

Dr Brigitte Blond

Source : Le Quotidien du Médecin: 9434