Le Sénat valide le suivi numérique des patients Covid et inscrit de nouvelles garanties

Par
Publié le 06/05/2020
Palais du Luxembourg

Palais du Luxembourg
Crédit photo : GARO/PHANIE

Mardi soir a été voté au Sénat le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire. Les sénateurs ont notamment validé le fameux article 6 qui crée un système de suivi des malades, mais non sans y apporter quelques garanties.

Cet article entérine donc la création, par décret en Conseil d’État, d’un système d’information permettant le traitement et le partage de « données à caractère personnel concernant la santé relatives aux personnes atteintes » par le coronavirus.
« Si on n'a pas de "tracing", on n'a pas de déconfinement » à partir du 11 mai, a assuré le ministre de la Santé Olivier Véran. Des « brigades » ou « anges gardiens », notamment agents à l'Assurance maladie, seront chargés de faire remonter la liste des cas contacts des personnes infectées. Le système qui centralisera les informations est « le dispositif central du déconfinement » car il faut pouvoir « identifier les personnes contaminées » afin qu'elles s'isolent, mais pas « à n'importe quel prix » pour les libertés ou la protection des données personnelles, selon le rapporteur LR Philippe Bas.

Il est prévu dans le texte que les médecins qui prennent en charge les personnes concernées « participent à la mise en œuvre de ces systèmes d’information » et puissent avoir accès aux « données nécessaires à leur intervention ». Plusieurs voix s’étaient élevées, dont celles de l’Ordre et du SML, pour réclamer des garanties sur ce système d’information. Plusieurs ajustements apportés en commission ont donc été votés hier soir. Le dispositif permettra bien une dérogation au secret médical puisqu’il est précisé que les données pourront être traitées et partagées « sans le consentement des personnes intéressées ». En revanche il sera bien limité dans le temps, celui de l’état d’urgence sanitaire, et circonscrit aux données concernant l’infection par le virus. Les données à caractère personnel ne pourront être conservées à l’issue de l’état d’urgence sanitaire. Le projet de loi prévoit aussi la possibilité de refuser d’être inscrit au fichier de suivi des malades, par exemple pour les personnes ayant été désignées à tort comme ayant été en contact avec un malade.

Un comité de contrôle

Les sénateurs ont refusé d'habiliter le gouvernement à légiférer par ordonnances sur cette question et ont créé une instance de contrôle, ce à quoi le gouvernement ne s'est pas opposé. Ce « comité de contrôle et de liaison » est chargé notamment « d'évaluer, grâce aux retours d'expérience des équipes sanitaires de terrain, l'apport réel des outils numériques à leur action » mais aussi de « vérifier tout au long de ces opérations le respect des garanties entourant le secret médical ».

Le gouvernement a cherché en vain à supprimer le droit d'opposition des malades, le bornage dans le temps du dispositif ainsi que son ciblage sur le Covid-19, souhaitant laisser la possibilité d'ajouter des données de santé complémentaires. Plusieurs groupes politiques se sont dit partagés, notamment les élus de l'Union centriste et les socialistes, certains jugeant impératif le consentement des malades ou le respect du secret médical.
D'autres se sont farouchement opposés au dispositif, même amendé, comme les communistes. Ils ont enfin explicitement exclu que le texte puisse servir de base juridique au déploiement de l'application pour smartphones StopCovid, qui devrait être prête le 2 juin. Mais « il n'y a pas de lien entre l'article 6 et StopCovid », a martelé Olivier Véran.


Source : lequotidiendumedecin.fr