E N préparation depuis de longs mois, le projet de loi de modernisation du système de santé n'attend plus que l'arbitrage toujours « imminent » sur la question de l'indemnisation de l'aléa thérapeutique pour être présentée en conseil des ministres.
Le ministère de la Santé a profité de ce retard pour revoir les deux premiers titres de ce projet de loi concernant la « démocratie sanitaire » et « la qualité du système de santé ». Outre les principales mesures relatives aux droits des malades, à la régionalisation du système de santé ou à la formation médicale continue qui restent globalement inchangées (« le Quotidien » du 11 juillet 2000), l'avant-projet de loi précise les modalités de la réforme de l'Ordre des médecins, renforce considérablement la loi « anticadeaux » et prévoit la mise en place d'un office des professions paramédicales.
• Renforcement de la loi anticadeaux et extension des déclarations obligatoires d'intérêts des experts médicaux.
L'avant-projet de loi renforce les règles de transparence concernant les liens entre l'industrie des produits de santé (notamment les laboratoires pharmaceutiques) et les experts médicaux. Ainsi, il précise que « tous les membres des commissions, conseils et groupes de travail siégeant auprès du ministre chargé de la Santé et de la Sécurité sociale » ne peuvent prendre part aux délibérations et aux votes de ces instances s'ils ont un intérêt direct ou indirect dans l'affaire.
Pour éviter cet inconvénient, ils devront, au moment de leur nomination, déclarer leurs liens directs ou indirects avec les entreprises, les établissements ou les organismes dont les dossiers pourraient être soumis à l'instance dans laquelle ils siègent et cette déclaration sera rendue publique.
De même, tout médecin s'exprimant en public ou dans la presse sur un produit donné devra faire état des liens avec les entreprises qui ont un intérêt dans sa production et sa diffusion sous peine de sanctions ordinales.
Le texte renforce considérablement la loi « anticadeaux ». Cette loi prévoit que les membres des professions médicales ne peuvent recevoir des avantages en nature ou en espèces par des entreprises assurant des prestations ou produisant des produits pris en charge par l'assurance-maladie sous peine de 500 000 F d'amende et de deux ans d'emprisonnement. Non seulement cette interdiction est étendue aux pharmaciens, aux membres des commissions consultatives siégeant auprès du ministre et aux membres de toutes les agences rattachées au ministère de la Santé, mais elle concerne toutes les entreprises commercialisant des produits de santé qu'ils soient ou non remboursés par l'assurance-maladie.
En outre, les entreprises elle-mêmes en tant que personnes morales deviennent passibles de sanctions très lourdes. A savoir le quintuple de l'amende fixée pour les médecins et des peines allant du simple placement sous surveillance de l'entreprise à sa suspension d'activité et à son exclusion des marchés publics à titre définitif.
• Séparation des fonctions administratives et disciplinaires de l'Ordre des médecins. La réforme proposée par l'avant-projet de loi consiste pour l'essentiel à bien distinguer ces deux fonctions. Au niveau régional, où il n'existait jusqu'à présent qu'une instance disciplinaire, coexistera désormais un conseil régional chargé de représenter l'Ordre au niveau régional et de coordonner l'action des conseils départementaux et une « chambre disciplinaire de première instance ». Pour garantir la neutralité de ses membres, la règle de non-cumul des fonctions ordinales et disciplinaires est édictée, et cette instance sera désormais présidée par un magistrat.
Au niveau national, là où sont traitées les affaires en appel, l'ancienne section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre devient une chambre disciplinaire nationale qui passe de huit à douze membres et est présidée, comme c'était déjà le cas, par un conseiller d'Etat. La règle de non-cumul des mandats s'exerce également à ce niveau là. Le texte précise que, outre l'auteur de la plainte, peuvent faire appel des décisions de la chambre disciplinaire de première instance le ministre de la Santé, le préfet du département, le procureur de la République, le conseil départemental ou national de l'Ordre.
• Création d'un office des professions paramédicales.
Certaines professions paramédicales étant dépourvues d'ordre professionnel, l'avant-projet de loi prévoit, conformément aux propositions du rapport Nauche (« le Quotidien » du 5 septembre 2000), la création d'un office des professions d'infirmier, masseur-kinésithérapeute, orthophoniste, orthoptiste et pédicure-podologue. Cet office ne concernera cependant que les professionnels exerçant à titre libéral.
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