O N désigne sous le terme de télomères les segments terminaux des bras de chromosomes indispensables pour maintenir l'intégrité du matériel génétique pendant le cycle cellulaire. Très riches en guanine, les télomères sont constitués par des répétitions de séquences des motifs contenant 6 paires de bases. Ces séquences représentent l'horloge mitotique mais elles protègent aussi contre les recombinaisons/translocations et les autres mécanismes susceptibles d'altérer la structure et, de ce fait, la fonction des chromosomes. Les télomères interviennent donc dans la prolifération cellulaire et ils pourraient aussi être impliqués dans la cancérogenèse. En effet, la télomérase - transcriptase inverse qui ajoute des répétitions télomériques à partir d'une matrice d'ARN et compense ainsi la diminution de longueur des télomères lors de la réplication - est active dans environ 90 % des tumeurs chez l'homme. Les 10 % restants sont qualifiées d'ALT pour « alternative lenthening of telomeres ».
Rallonger leurs télomères
Partant du fait que les levures sont immortelles, puisqu'elles expriment constitutivement la télomérase et qu'elles sont donc capables de rallonger leurs télomères, les Drs Haim Cohen et David Sinclair se sont penchés sur la survenue d'événements de recombinaison chez les levures. Ils ont établi que ce type d'événements peuvent survenir et générer deux types de structures télomériques différentes (type I et type II, le second impliquant plus spécifiquement la protéine sgs 1). « Or, on connaissait déjà le gène sgs 1 ainsi que d'autres gènes de la famille rad impliqués dans les phénomènes de recombinaison », explique au « Quotidien » le Dr Vincent Mouly (CNRS UMR 7000, hôpital la Pitié, Paris). Les chercheurs américains ont analysé l'importance du rôle joué par sgs 1 dans des souches de levures où la télomérase est rendue inactive. Ils ont prouvé que les levures télomérase négatives et sgs 1 négatives perdent leur « immortalité ». En revanche, insérer le gène sgs 1, ou son équivalent murin (gène WRN) induit un phénomène de sauvetage (rescue) par élongation des télomères. Ces télomères néoformés sont de type II et correspondent donc à des phénomènes de recombinaison. « Une fois la première série de recombinaisons effectuée, sgs1 n'est plus essentiel à la poursuite des divisons cellulaires. Globalement, sgs 1 joue donc un rôle dans l'ouverture des séquences riches en G et dans la génération de recombinaisons - les deux fait pouvant tout à fait être liés », analyse le Dr Mouly.
Chez l'homme, on peut penser, au vu des travaux des Drs Cohen et Sinclair, que dans le cadre des tumeurs générées par un mécanisme de type ALT, le gène WRN (équivalent animal de sgs 1) soit impliqué en raison de son action facilitatrice des recombinaisons. Les chercheurs espèrent donc que si les processus de recombinaison-translocation sont similaires chez l'homme, « on pourrait alors bloquer ou inhiber la protéine WRN dans les cellules cancéreuses, et alors éviter la prolifération ».
« Proceedings of the National Academy of Sciences », vol. 98, n° 6, 13 mars 2001.
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