N I Jacques Chirac ni Lionel Jospin ne viendront cette année inaugurer les 22es Assises nationales des professionnels de santé qui s'ouvrent aujourd'hui à Paris. Le premier a déjà plusieurs fois utilisé cette tribune pour faire passer ses messages sur la politique d'assurance-maladie. Le second n'a pas répondu officiellement à l'invitation qui lui était faite cette année, sans doute par volonté de ne pas interférer dans la concertation qu'Elisabeth Guigou a engagée avec la profession.
C'est précisément cette concertation sur l'avenir de la médecine de ville qui sera au cur des préoccupations de la centaine de délégués issus des centres départementaux de professions de santé et des représentants des 24 syndicats professionnels représentatifs qui composent cette organisation (1).
Deux jours durant, ils débattront des modalités de la réforme du système de soins qu'ils entendent défendre face aux pouvoirs publics et travailleront notamment à proposer une alternative « à la maîtrise budgétaire » des dépenses maladie actuellement en place.
L'objectif est, selon son président, le Dr Jacques Reignault, de parvenir à une plate-forme de propositions communes à toutes les professions de santé afin d'être à même de peser sur les orientations qu'arrêteront les pouvoirs publics à l'issue de la concertation.
Un projet de texte a donc été élaboré au sein du conseil d'administration du CNPS sur les deux principaux thèmes de préoccupation des professionnels : la maîtrise des dépenses de santé et le partenariat conventionnel avec les organismes d'assurance-maladie. Ce document a ensuite été envoyé à toutes les organisations professionnelles pour correction et amendement. Il sera débattu aujourd'hui par les délégués départementaux au sein de deux ateliers de travail avant d'être approuvé définitivement lors de l'assemblée générale qui se tient demain matin.
Des clivages
La démarche n'allait pas forcément de soi car le CNPS a été au cours de ces dernières années traversées par de forts clivages entre les syndicats qui les ont conduits à adopter des positions très différentes sur la politique de santé des pouvoirs publics.
Schématiquement, on trouvait deux camps. D'un côté, ceux, majoritaires au sein du CNPS, qui dénonçaient la logique de maîtrise des dépenses de santé adoptée par le plan Juppé, et ont refusé par la suite de signer avec la Sécurité sociale les conventions qui en découlaient (pour les médecins, la CSMF, la FMF et le SML se rangent dans ce camp). De l'autre côté, ceux qui ont opté pour le partenariat conventionnel avec l'assurance-maladie afin d'engager des réformes dont ils souhaitent la mise en uvre (pour les médecins c'est le cas de MG-France).
Puisque tout le monde semble aujourd'hui d'accord pour dresser le constat de blocage des relations entre les caisses maladie et les professions de santé, les organisations membres du CNPS sont parvenues, semble-t-il, à dépasser leurs oppositions pour défendre des principes communs. « Il y a eu peu à peu une prise de conscience de la nécessité de se fédérer au sein du CNPS. C'est une étape supplémentaire qui est franchie dans le sens de l'unité d'action », se félicite le Dr Reignault qui affirme avoir déjà recueilli un consensus sur ses propositions concernant la maîtrise médicalisée des dépenses et continue à travailler sur le chapitre du partenariat conventionnel.
Manifestation en juin ?
« Nous sommes tous favorables à la maîtrise médicalisée, rappelle François Maignien, président de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs et vice-président du CNPS. C'est sur la stratégie que nous avons eu des divergences. Il y a ceux qui ne peuvent rester en dehors du partenariat conventionnel et préfèrent jouer le pragmatisme et ceux qui refusent toute réforme tant que le dispositif actuel de maîtrise (des dépenses maladie) n'est pas supprimé. Mais aujourd'hui tout le monde est d'accord pour dire que le système conventionnel tel qu'il est ne peut plus fonctionner. »
Une fois l'accord des membres du CNPS obtenu, le texte sera présenté aux pouvoirs publics. Une délégation du CNPS sera en effet reçue successivement par le ministre délégué à la Santé, Bernard Kouchner, et par les quatre sages qui composent la mission de concertation pour la rénovation des soins de ville. Mais pour s'assurer d'être bien entendu, le CNPS devrait également fixer au cours de ses assises la date et les modalités d'une grande manifestation nationale au mois de juin à Paris. Elle aura pour principal objectif de demander que la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale modifie le dispositif actuel de maîtrise des dépenses de santé.
(1) Pour les médecins qui siègent au CNPS la Confédération des syndicats médicaux français, la Fédération des médecins de France, MG-France et le Syndicat des médecins libéraux.
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