La toxine botulinique, une option thérapeutique de second ligne

Publié le 08/06/2015
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Les injections de toxine botulinique de type A sont une option thérapeutique à proposer chez les femmes présentant une hyperactivité vésicale réfractaire idiopathique. Environ 15 % des femmes de plus de 40 ans en souffrent et ce chiffre augmente avec l’âge.

L’hyperactivité vésicale a un impact important sur la qualité de vie des femmes.

« Le traitement de première ligne comporte des mesures hygiénodiététiques, une rééducation et des anticholinergiques, éventuellement associés à des estrogènes locaux en cas de carence estrogénique ménopausique », rappelle le Pr Xavier Deffieux (hôpital Antoine Béclère, Paris).

L’échec du traitement anticholinergique se définit par l’absence d’efficacité significative d’au moins deux médicaments per os, pendant une période d’au moins trois mois ou par l’arrêt du traitement du fait d’effets secondaires.

En cas d’échec de ces mesures thérapeutiques de première ligne, une neuromodulation périphérique (lire ci-dessous) ou des injections intradétrusoriennes de toxine botulinique peuvent être proposées. Avant de proposer une injection intradétrusorienne de toxine botulinique, la confirmation du caractère idiopathique de l’hyperactivité vésicale nécessite d’éliminer une cause urologique, gynécologique, neurologique et psychogène par une évaluation clinique complète, un calendrier mictionnel, une débitmétrie, un examen cytobactériologique des urines, une échographie de l’appareil urinaire avec mesure du résidu postmictionnel et une cystoscopie. Un bilan urodynamique est conseillé pour les patientes à risque accru de rétention urinaire : les femmes âgées de plus de 75 ans ou celles ayant eu préalablement une chirurgie pour cure d’incontinence.

Une sélection rigoureuse des patientes

La toxine botulinique (Botox) est indiquée dans le traitement de l’hyperactivité vésicale idiopathique associée à des symptômes incluant : 3 épisodes d’incontinence urinaire avec urgenturie sur 3 jours et une fréquence urinaire définie par un nombre de mictions ≥ 8 par jour et ne répondant pas de manière adéquate aux anticholinergiques (après 3 mois de traitement) ou en cas d’intolérance au traitement anticholinergique et ne répondant pas à une kinésithérapie bien conduite.

« Avant l’injection, il est recommandé de s’assurer de la faisabilité et de l’acceptabilité de l’autosondage, même si le risque de rétention urinaire est faible (6 %), souligne le Pr Xavier Deffieux (hôpital Antoine Béclère, Paris). Le risque de rétention urinaire postinjection impose une sélection rigoureuse des patientes capables de s’autosonder ». L’injection dans le détrusor est réalisée après une anesthésie locale urétrovésicale (lidocaïne), éventuellement complétée par l’inhalation de protoxyde d’azote. L’injection est réalisée au bloc opératoire ou en salle d’endoscopie.

La dose initiale est de 50 unités de Botox : si la réponse est insuffisante, la dose de 100 U peut être utilisée lors des injections suivantes.

La patiente est surveillée jusqu’à la reprise mictionnelle. L’amélioration clinique est habituellement observée dans les deux semaines suivant l’injection. Elle est revue à trois mois : calendrier mictionnel, débitmétrie, résidu postmictionnel et examen cytobactériologique des urines sont réalisés. « Une nouvelle injection pourra être réalisée lorsque le bénéfice de la précédente s’estompe, en moyenne entre 6 et 9 mois, mais parfois il dure plus longtemps chez certaines femmes. Il faut toutefois respecter un intervalle minimum de 3 mois entre deux injections, quel que soit le lieu d’injection (sur le visage par exemple pour des raisons esthétiques) », ajoute le Pr Xavier Deffieux.

L’injection est contre-indiquée chez les patientes présentant une infection de l’appareil urinaire au moment de l’administration et chez les patientes présentant une rétention urinaire aiguë ou chronique chez lesquelles le sondage intermittent est contre-indiqué ou refusé.

La toxine botulinique est généralement bien tolérée et utilisée depuis des années dans d’autres indications. Les injections de toxine botulinique sont déjà connues depuis longtemps pour leur efficacité et leur tolérance chez les patients neurologiques. « Nous n’avons pas observé de diminution de l’efficacité chez les femmes chez lesquelles la première dose est efficace, au fur et à mesure de la répétition des injections », conclut le Pr Xavier Deffieux.

D’après un entretien avec le Pr Xavier Deffieux, hôpital Antoine Béclère, Paris

Liens d’intérêt : Le Pr Xavier Deffieux est consultant pour Allergan

Christine Fallet

Source : Bilan spécialiste