Des instruments toujours plus sophistiqués

La stimulation, une voie d’avenir pour la chirurgie

Publié le 08/06/2015
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Un objectif éthique  prioritaire : " Jamais la première fois sur le patient »

Un objectif éthique prioritaire : " Jamais la première fois sur le patient »
Crédit photo : PHANIE

« La simulation pour la formation chirurgicale est aujourd’hui un domaine en plein développement et qui offre de multiples perspectives en gynécologie-obstétrique. Et il est certain qu’à terme, elle sera largement utilisée dans le cadre de la formation initiale et continue des gynécologues-obstétriciens », explique le Dr Patrice Crochet, PH de gynécologie-obstétrique à l’hôpital de la Conception à Marseille (AP-HM).

L’intérêt de la simulation est clairement reconnu par les autorités sanitaires, comme l’a montré un rapport publié en 2012 par la Haute Autorité de santé (HAS). Ce rapport constatait aussi qu’aux États-Unis, la simulation est déjà utilisée en pratique courante pour la formation initiale des professions médicales. En France, il s’agit encore d’une « activité émergente mais qui intéresse de plus en plus le monde de la santé », une approche volontariste est actuellement proposée. « La formation par les méthodes de simulation en santé doit être intégrée aux programmes d’enseignement des professionnels de santé à toutes les étapes de leur cursus (initial et continu) ». Un objectif éthique devrait être prioritaire : « Jamais la première fois sur le patient », soulignait le rapport.

Le Dr Crochet le reconnaît : la simulation n’est pas complètement une nouveauté en chirurgie. « Cela fait très longtemps que les chirurgiens s’exercent en faisant de la dissection de cadavres, ce qui est déjà une première forme de simulation », indique-t-il, en ajoutant que l’entraînement sur des animaux vivants peut aussi être rangé dans cette catégorie. « En France, nous avons des centres de pointe où l’on peut faire de la chirurgie sur des cochons vivants. Il s’agit d’une pratique très proche du réel car on travaille sur des tissus vivants. Mais il y a aussi des inconvénients, notamment sur un plan éthique. Dans les pays anglo-saxons, cette simulation sur des animaux vivants est d’ailleurs interdite. Il y a aussi le problème du coût des animaleries ».

Pour le reste, la gynécologie-obstétrique a été plutôt en pointe dans l’intérêt porté à la simulation plus moderne. « Cela est lié au fait que c’est dans notre spécialité que la cœlioscopie a pris son essor dans les années 1990. Les chirurgiens confirmés se sont alors retrouvés face à la nécessité d’apprendre une technique nouvelle », indique le docteur Crochet.

Un premier outil a été le pelvitrainer qui est maintenant largement utilisé. « Il s’agit d’une boîte avec une caméra dans laquelle on fait entrer des instruments habituellement utilisés en cœlioscopie. On peut ainsi réaliser des exercices simples pour s’entraîner à une gestuelle de base ».

Aux États-Unis, le pelvitrainer est utilisé dans le cadre d’une certification pour tous les chirurgiens qui font de la cœlioscopie. « Au niveau européen, une initiative a été lancée il y a deux ans pour instaurer une validation de l’exercice sur pelvitrainer dans le cadre d’un programme appelé GESEA (Gynaecological Endoscopic Surgical Education Assessment). À ce sujet, des recommandations seront annoncées lors du prochain congrès du CNGOF », souligne le Dr Crochet.

De nouveaux outils de simulation, plus innovants, utilisent le principe de la réalité virtuelle. « Il s’agit des programmes sur ordinateurs et consoles qui permettent de se mettre dans la situation d’un chirurgien en train d’opérer. C’est très sophistiqué. Via la console, vous pouvez bouger les instruments et quand vous appuyez sur un tissu, vous avez une sensation de retour de force dans la main », explique le Dr Crochet. « Au cours des dix dernières années, de nombreux instruments se sont développés. Ils sont encore en cours d’évaluation pour la plupart et pas encore entrés dans la pratique courante », ajoute-t-il.

Selon le Dr Crochet, les perspectives offertes par la simulation sont prometteuses. « Cela permet de s’entraîner dans des conditions qui reproduisent le réel mais qui permettent aussi de s’en éloigner. On peut ainsi répéter les gestes ou organiser des scénarios de situations cliniques suivis d’un débriefing, qui est difficile à faire dans le cadre d’une pratique clinique quotidienne ».

D’après un entretien avec le Dr Patrice Crochet, PH dans le service de gynécologie-obstétrique à l’hôpital de la Conception à Marseille (AP-HM)
Antoine DALAT

Source : Bilan spécialiste