L’exposition du Centre Pompidou explore une partie de l’oeuvre qui ne se réduit pas à la seule thématique de l’ironie, comme l’illustre le très bel ouvrage édité par Citadelles et Mazenod. Il donne à penser avec les nombreux extraits d’écrits et réflexion de Paul Klee mis en correspondance avec les oeuvres et le parcours biographique. Le travail de l’artiste tout au long de sa vie, influencé au début par Manet et Cézanne, plus tard par Delaunay et Picasso, procède d’une certaine recherche métaphysique qui détermine ensuite le style adopté par l’artiste. Que cela plaise ou non est une autre histoire. En témoigne cet extrait De l’art moderne publié en 1924 : « Tout d'abord, l’artiste n’accorde pas aux apparences de la nature la même importance que ses détracteurs réalistes. Il ne se sent pas tellement assujetti à ces réalités, les formes arrêtées ne représentant pas à ses yeux l’essence du processus créateur dans la nature. Les forces créatrices qui président aux formes lui importent plus que les formes qui en résultent. »
Ce dialogue avec la nature est un des fils que tire Klee dans de nombreux tableaux. C’est aussi l’un des enseignements développés par l’artiste lorsqu’il était professeur au Bauhaus. Comment alors se reconnaître dans une école, une avant-garde ? Cette singularité de l’oeuvre écarte toute adhésion à une école, voire à une théorie. « L’oeuvre n’est pas la loi. Elle est au-dessus de la loi », signe Klee dans la pensée créatrice. Klee rejette ainsi l’idée de tout formalisme. La seule vérité repose sur le mouvement qui incite à de multiples variations comme en musique. Klee était d’ailleurs un brillant musicien. D’où la profusion virtuose des oeuvres, plusieurs centaines par an. Comment trouver si l’on ne cherche pas ce lien entre nature et art, création et dégénérescence, vie et mort. À la fin, certaines peintures conservent leur mystère, leur secret. « Tout devrait-il être su ? Ah, non je ne le crois », écrit-t-il dans un coin de son ultime tableau en 1940 comme un testament.
Ce livre retrace un itinéraire artistique. Il ne renouvelle pas l’interprétation de l’oeuvre. C’est une de ses limites. Mais il constitue un écrin admirable pour cet artiste qui n’a cessé d’interroger son art, de le questionner afin de peindre un art de son temps qui désormais entretient le dialogue avec les « regardeurs » d’aujourd'hui avant ceux de demain. C’est peut-être cela que l’on appelle la modernité.
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