L E ministre délégué à la Santé, Bernard Kouchner, sera-t-il celui qui joindra le chèque à la parole ? Depuis plus de vingt ans, tous les gouvernements se sont heurtés, sans aller au-delà, au casse-tête de l'indemnisation du risque thérapeutique. Mesure indispensable aux yeux de tous, mais ô combien coûteuse : un à deux milliards de francs par an, selon les estimations, hors hépatite C. Cette fois encore, le gouvernement a promis d'inclure l'indemnisation de l'aléa thérapeutique dans la loi de modernisation du système de santé qui étend par ailleurs les droits des malades et modernise le système de soins. Un texte très finalisé relatif à l'indemnisation des victimes d'aléa thérapeutique, et que « le Quotidien » s'est procuré, attend les derniers arbitrages interministériels.
Un office national
Selon ce document de travail, un office national d'indemnisation des accidents médicaux et affections iatrogènes, financé principalement par « une dotation de l'assurance-maladie », est chargé d'indemniser les victimes. L'accident médical ou l'affection doivent être directement imputables à des actes de prévention (vaccination, par exemple), de diagnostic (échographie) ou de soins et le dommage subi doit présenter un caractère de gravité dont l'échelle demeure inconnue. Elle doit être fixée en Conseil d'Etat. Par ailleurs, il ne doit pas y avoir faute, ni du professionnel de santé, ni d'un établissement de santé, ni d'un producteur de produits.
Le cas échéant, la loi prévoyant l'indemnisation de l'aléa thérapeutique ne s'applique qu'aux accidents survenus à compter du 1er janvier 2001. Néanmoins, si une personne apprend, pour la première fois, après le 1er janvier 2001, que le préjudice dont elle souffre est dû à un acte pratiqué avant cette date, elle pourra obtenir réparation. Une exception est faite pour les personnes ayant contracté une hépatite C « à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins ». Dans ce cas, la loi est rétroactive. Si elles ont développé une maladie, ces personnes seront indemnisées, « lorsque le préjudice indemnisable s'est réalisé avant le 1er janvier 2001 ». L'indemnisation des victimes de l'hépatite C est financée par une subvention de l'Etat.
Bien que l'office national d'indemnisation ne soit tenu d'indemniser les victimes qu'en l'absence de faute, il est prévu que, si une faute a été commise, l'office peut indemniser la victime, avant de se retourner soit vers le responsable du dommage causé, soit vers son assureur.
Des commissions régionales
Selon le schéma retenu, les victimes peuvent saisir directement, dans chaque région, une commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Cette instance a pour mission de « faciliter le règlement amiable des litiges entre usagers et professionnels de santé, établissements de santé ou producteurs de produits de santé et de participer à l'application des règles d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux et d'affections iatrogènes ». Si les dommages subis présentent le caractère de gravité requis, la commission régionale émet un avis qu'elle transmet notamment à l'office national d'indemnisation qui prend le relais.
Volonté politique ?
Dans le milieu associatif, on considère que « ce document démontre que tout est prêt et que si l'on ne dépose pas ce texte à l'Assemblée nationale, c'est qu'il n'y a pas de volonté politique de le faire ». Les associations refusent cependant de trop croire à l'aboutissement de vingt ans de lutte acharnée pour obtenir une législation en la matière. « Si le texte n'est pas arbitré dans les jours qui viennent, il risque de ne pas passer au Parlement avant l'été. » Pour le moment, la date de la réunion interministérielle débattant des derniers arbitrages sur le texte n'est toujours pas fixée.
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