L ES quelque 30 000 médecins exerçant en clinique privée vont avoir aujourd'hui une très mauvaise surprise : en ce dernier jour ouvré du mois de mars, ils ne toucheront pas le remboursement de leurs honoraires.
Avec trois mois de décalage, ils font les frais de l'installation, le 1er janvier dernier, du nouveau circuit de paiement de l'hospitalisation commerciale. Que se passait-il jusque-là ? Le financement de l'activité des cliniques était géré par les caisses primaires d'assurance-maladie (CPAM). Les établissements envoyaient leur ardoise à leur caisse via un formulaire (le « bordereau 615 ») sur lequel figurait : en haut, les frais de personnels, de médicaments, d'hôtellerie, dont les tarifs découlaient d'un accord entre les cliniques, l'assurance-maladie et le gouvernement ; en bas, le détail de tous les actes médicaux dont les tarifs relevaient de la convention médicale. Recevant ce bordereau, les CPAM réglaient immédiatement - dans les faits, deux mois après, les dépenses de janvier étant remboursées en mars, celles de février en avril... - aux cliniques et à leurs médecins 80 % de l'addition. Les 20 % restants étaient versés après traitement complet du dossier, ce qui pouvait prendre un mois, six mois, un ou deux ans s'il manquait des pièces.
Le 1er janvier dernier, ce système a été adapté au passage des cliniques sous la coupe exclusive de l'Etat, décidé dans la loi de financement de la Sécurité sociale de 2000. Les caisses n'étant plus gestionnaires de l'enveloppe des cliniques privées, elle a été confiée, au niveau régional, à une caisse pivot, destinataire du bordereau 615 qui, lui, n'a pas changé.
Problème : les honoraires des médecins étant restés sous la responsabilité des CPAM, cette caisse pivot ne s'intéresse qu'à la partie haute du formulaire, et envoie aux caisses primaires une copie de la partie basse (honoraires des médecins). L'opération prend du temps. Pour son coup d'envoi (le nouveau dispositif a été mis en place le 1er janvier, mais, compte tenu du délai de paiement antérieur de deux mois, les CPAM ont continué à rembourser aux cliniques en janvier leurs dépenses de novembre 2000 et en février leurs dépenses de décembre 2000), la machine tourne à vide. Il pourrait même s'écouler « six mois », estime le Dr Serge Laruë-Charlus, président de la Conférence des présidents de CME (commissions médicales d'établissement) des cliniques privées, avant que les comptes mandataires des praticiens soient alimentés dans les cliniques. Avec des situations locales contrastées, puisque certaines CPAM ont accepté de faire des avances aux établissements - avances qui ne se fondent sur aucune dépense réelle, tandis que d'autres ont totalement bloqué les remboursements.
La CNAM rassurante
Jugeant qu' « il n'est pas acceptable que les praticiens soient pris en otage lors d'une modification administrative qui ne les concerne pas », le président de la CSMF (Confédération des syndicats médicaux), le Dr Claude Maffioli, a écrit au directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), Gilles Johanet, à qui il demande « une proposition urgente pour résoudre cette situation qui deviendra vite intolérable ».
La CNAM, elle, se veut rassurante. Si elle admet qu'il y a des difficultés liées à la « rapidité » avec laquelle il a fallu mettre le nouveau système de paiement en place, elle assure que « tous les agents comptables de l'assurance-maladie s'investissent pour régulariser la situation ».
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