De notre correspondante
P ARMI les patients qui reçoivent une greffe de rein, 35 % présentent dans la première année après la transplantation un épisode de rejet aigu. L'hôte réagit immunologiquement contre le greffon, et la réaction destructive se manifeste par une détérioration soudaine de la fonction du transplant rénal. Ce rejet est un facteur de risque majeur d'échec de la greffe. Un diagnostic précoce est crucial pour la mise en route rapide d'un traitement.
La biopsie rénale représente le seul examen diagnostique fiable. Or, malgré les progrès, elle n'est pas sans complications. Une approche non invasive serait précieuse pour aider à diagnostiquer précocement le rejet de greffe.
Li (Cornell University, New York) et coll. proposent une approche qui repose sur le dosage de l'ARNm de la perforine et de la granzyme B dans l'urine. Ces deux protéines sont présentes dans les granules cytoplasmiques des cellules T cytotoxiques et des cellules tueuses naturelles et contribuent à induire le décès des cellules cibles. La perforine provoquerait la formation de pores dans la membrane des cellules cibles, par lesquels la granzyme B entrerait dans les cellules et causerait la fragmentation de l'ADN, entraînant ainsi le décès par apoptose. Ces protéines ont été identifiées comme des marqueurs sensibles du rejet de greffe chez l'animal et l'homme.
Li et coll. ont mesuré les taux urinaires des ARNm de la perforine et de la granzyme B (par PCR) chez 22 patients transplantés rénaux ayant un épisode aigu de rejet confirmé par biopsie (24 échantillons urinaires), ainsi que chez 63 transplantés rénaux sans signe de rejet (127 échantillons urinaires).
Significativement plus élevés
Leurs résultats montrent que les taux urinaires d'ARNm de la perforine et de la granzyme B sont significativement plus élevés chez les patients qui ont un épisode de rejet aigu.
En utilisant une valeur seuil prédéterminée (0,9 fg d'ARNm de perforine/mg d'ARN total), les taux d'ARNm de perforine au-dessus de cette valeur identifient un rejet aigu avec une sensibilité de 83 % et une spécificité de 83 %. Les taux d'ARNm de la granzyme B au-dessus d'une valeur seuil prédéterminée (0,4 fg/mg d'ARN total) identifient un rejet aigu avec une sensibilité de 79 % et une spécificité de 77 %.
De plus, le dosage urinaire répété au cours des dix premiers jours après la transplantation montre que les taux d'ARNm de la perforine et de la granzyme B sont plus élevés chez les 8 patients qui ont développé un rejet dans les dix premiers jours que chez les 29 patients qui n'ont pas développé de rejet durant cette période.
« Nous avons démontré qu'un diagnostic non invasif précis du rejet aigu est possible, en mesurant les taux d'ARNm de la perforine et d'ARNm de la granzyme B dans les cellules urinaires, et nous pensons que ce test diagnostique pourrait peut-être aussi prédire le développement du rejet aigu », déclarent Li et coll. La précision diagnostique, ajoutent-ils, pourrait être encore améliorée en mesurant d'autres gènes supplémentaires comme le gène du ligand fas.
Selon le Dr Jean-Paul Soulillou (Hôtel-Dieu, Nantes), auteur d'un éditorial associé, l'utilité et l'utilisation de ces nouveaux tests dépendront de plusieurs facteurs : sensibilité, spécificité, rapidité des résultats, et coût. Il note que cette approche « pourrait être surtout utile, non pour le diagnostic du rejet aigu dont la prévalence a diminué, mais pour détecter des changements plus subtils dans l'état immun de l'hôte ». Il sera important « d'évaluer si ces tests, effectués régulièrement après la transplantation, seront suffisamment sensibles pour détecter le rejet infraclinique », ajoute-t-il.
«New England Journal of Medicine », 29 mars 2001, pp. 947 et 1006.
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