Fin du certificat médical pour le sport scolaire : simplification ou mise en danger ?

Publié le 12/02/2016
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Crédit photo : S. TOUBON

C’est une des mesures de simplification voulues par François Hollande et promulguées cette semaine avec la loi de modernisation du système de santé, une petite révolution dans le milieu scolaire : aux termes de l’article L 552 de la loi Touraine, « tout élève apte à l’éducation physique et sportive est réputé apte aux activités physiques et sportives volontaires ».

Autrement dit, les élèves, collégiens ou lycéens, adhérents aux associations sportives des établissements scolaires sont désormais dispensés de produire chaque année un certificat médical de non-contre-indication. Ils n’y étaient pas astreints pour suivre les APS (activités physiques et sportives) obligatoires, mais, lorsqu’ils s’engageaient volontairement dans une discipline périscolaire, sur le même stade et avec le même enseignant, ils devaient produire un sésame médical, « une formalité un tantinet absurde », estime Valérie Fourneyron, auteur de l’amendement qui abroge cette contrainte administrative unique, souligne-t-elle, en Europe.

Ainsi est levé « un frein à l’accès au sport scolaire, se félicite l’ancienne ministre des Sports, une formalité administrative dont le coût pesait sur les familles plus que celui de la licence annuelle, notamment pour les familles avec plusieurs enfants ». Cette « vraie avancée pour faire de la France une nation de sportifs pratiquants » est aussi saluée par l’Union nationale du sport scolaire (UNSS), qui a calculé que 2 millions de familles se trouvent exonérées de 20 à 25 millions d’euros de coût représentés par le certificat médical.

« Une vraie mauvaise idée »

Cette « démocratisation de l’accès au sport dès le plus jeune âge », selon la formule de Valérie Fourneyron, commence cependant à faire réagir les syndicats, sollicités par « le Quotidien ». « Voilà encore une vraie mauvaise idée, s’exclame ainsi le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Sous couvert de supprimer de la paperasse administrative, on gâche une belle occasion de faire de la prévention santé, au contraire de ce que revendique la loi Touraine : grâce au certificat de non-contre-indication, les collégiens et lycéens gardaient l’occasion de passer une vraie consultation, à un âge où ils sont exposés à des risques majeurs comme l’obésité ou les pratiques addictives. Le certificat était l’occasion d’une démarche d’éducation santé qu’il fallait structurer selon des risques identifiés à des âges particuliers. »

La fin de ce certificat est « une très mauvaise mesure », estime également le Dr Marc Rozenblat, président du Syndicat national des médecins du sport santé (SNMS, qui met en avant les données accidentologiques recueillies chez les adolescents : « Les morts subites survenues chez des sportifs scolaires nécessitent un minimum de suivi cardiologique et les certificats en fournissaient l’unique occasion. De même les risques sur le plan locomoteur pouvaient être prévenus lors de ces consultations et sous couvert de simplification administrative, on met en danger des classes d’âge entières qui maintenant ne seront plus vues par aucun médecin. » Tout en admettant que le renouvellement annuel fixait « une fréquence peut-être excessive », le président du SNMS « déplore que la loi n’ait pas mis à contribution la médecine scolaire, qui aurait pu effectuer le suivi approprié, dans le cadre même des établissements, sans grever les budgets des familles ».

L’établissement du certificat de non-contre-indication à la pratique sportive est un acte hors nomenclature, non remboursé par la Sécurité sociale, « ce qui demeure problématique », rappelle le Dr Ortiz.

Christian Delahaye

Source : lequotidiendumedecin.fr