Mise au point

Éjaculation précoce : apprendre à (re)prendre le contrôle…

Publié le 26/10/2015
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Les questions à se poser

• Est-ce une éjaculation précoce ?

La définition actuelle : un orgasme et une éjaculation, moins de 1 minute après la pénétration… et surtout une absence de contrôle, presque plus importante que la durée !

• Est-elle primaire ou secondaire ?

- Primaire : le patient a toujours eu une éjaculation précoce. Elle s’aggrave (ou non).

*C’est probablement compliqué ou très ancré.

- Secondaire : le patient a contrôlé des années son éjaculation avant de ne plus la contrôler (progressivement ou brutalement).

*Changement de partenaire ?

*Dysfonction érectile débutante associée… ?

• Est-elle systématique, quelle que soit la partenaire ?

• Alcoolisation ou usage de cannabis pour retarder l’éjaculation ?

• Et l’érection ?

- Est-elle stable ?

- Ou non ? Y a-t-il une tendance à perdre l’érection après pénétration ? (orgasme porte de sortie pour échapper à la difficulté à maintenir l’érection).

• Quelle importance l’éjaculation précoce a-t-elle dans la vie du patient (dévalorisation, dépression) et du couple ?

•Comment réagit la partenaire : est-elle partie (ou non), aidante (ou opposante, frustrée) ?

Ce qu’il faut faire

• Expliquer au patient :

- ce qu’est l’éjaculation précoce : un orgasme normal dont les différentes phases successives ont une durée raccourcie.

- comment améliorer les choses : la clé est de (re)prendre le contrôle ! Il faut prendre conscience des différentes phases : excitation, montée du plaisir, moment au-delà duquel il n’y a plus de contrôle. L’idée est de rester dans la phase de contrôle le plus longtemps possible pour ne passer dans la phase de perte de contrôle qu’au moment où on l’a décidé.

- Les aides possibles :

* la masturbation. Elle permet d’apprendre dans l’intimité à sentir et comprendre ces différentes phases,

* un travail comportemental (+++) avec un sexologue,

* éventuellement un médicament, pour initier l’apprentissage (un seul a l’AMM dans cette indication, les autres plus ou moins efficaces relèvent de cadre hors AMM) :

• antidépresseurs à faible dose : il y un rationnel à leur utilisation (à forte dose, ils suppriment l’orgasme ; à faible dose, ils le retardent de quelques minutes).

–› un dérivé d’antidépresseur à durée d’action ultracourte : dapoxétine, AMM dans l’indication, temps avant éjaculation multiplié par 3 ou 4, prise 1 à 3 h avant rapport sexuel.

–› un antidépresseur classique (plutôt en continu qu’à la demande) : paroxétine 10 mg (sujet de plus de 50 ans) ou 20 mg (sujet jeune), citalopram…

• antalgique : tramadol 100 mg, 2 h avant (risque de dépendance),

• anesthésique local (lidocaïne +prilocaïne). Pommade appliquée sur le gland 30 mn avant le rapport, essuyer avant pénétration (ne pas anesthésier la partenaire) !

Notons que les IPDE 5 en complément de ces traitements peuvent être utiles pour libérer du stress (crainte d’érection instable…).

Ce qu’il faut retenir :

Ne pas hésiter à passer la main et à adresser au sexologue.

D’après un entretien avec le Pr Nicolas Thiounn, urologue et le Dr Pierre Desvaux, andrologue, respectivement responsables de l’enseignement et de la pédagogie des DIU (sexologie, étude de la sexualité humaine) et DESC (andrologie) de l’Université Paris V

Liens d’intérêts - Pr Nicolas Thiounn : aucun ; Dr Pierre Desvaux : orateur pour UCB, AMS, Roche, Lilly, Menarini, Sanofi

Dr S. P.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9444