L ES médecins sont-ils particulièrement exposés aux violences urbaines qui n'ont cessé d'augmenter depuis quelques années ? Difficile de l'affirmer en l'absence totale de statistiques dans ce domaine. Si, selon des chiffres communiqués par l'Ordre des médecins, une quarantaine de praticiens ont été tués depuis 1961 dans l'exercice de leurs fonctions, la majeure partie de ces agressions sont le fait de déséquilibrés et sont, si l'on peut dire, inhérentes aux risques du métier.
En revanche, il est certain que les médecins, mais également les autres professions de santé, et notamment les pharmaciens, ont dû faire face depuis une dizaine d'année environ à une multiplication des agressions et des menaces qu'elles soient simplement verbales ou physiques, sans que l'on sache s'ils sont plus ou moins concernés que le reste de la population.
La seule enquête existante sur les risques de la pratique libérale remonte à 1996 et avait été conduite par l'Ordre des médecins de Gironde. Elle montrait qu'un tiers des médecins interrogés avaient déjà subi une agression. Dans un cas sur dix, celle-ci s'était accompagnée de violences, même si elles n'avaient donné lieu qu'une fois sur quatre au dépôt d'une plainte. Dans deux cas sur dix, les médecins disaient avoir été malmenés ou maltraités sans que le préjudice fût décelable. A l'origine de ces comportements agressifs, on trouvait l'obtention de certificats de scolarité ou d'arrêts de travail (17 %) suivis de la demande de médicaments (16 %), l'argent (15 %), les bons de toxique (8 %) ou encore les vols d'ordonnance (4 %).
La plupart des médecins exerçant dans les quartiers dits sensibles confirment qu'il s'agit dans la grande majorité des cas de chahut, d'incivilités, de dégradation de matériels ou d'agressions verbales.
Néanmoins, la situation semble, de ce point de vue, s'être nettement dégradée depuis quatre ou cinq ans, et le braquage de plusieurs médecins au cours de ces derniers mois a renforcé le sentiment d'insécurité des professionnels isolés qui font des visites et des gardes de nuit.
Le dernier en date s'est produit à Colombes, dans les Hauts-de-Seine, où deux médecins et une orthophoniste ont été attaqués et leurs cartes bancaires dérobées sous la menace d'une arme. Entre novembre et décembre, trois médecins ont été agressés pour la même raison dans le quartier du Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie. Plusieurs médecins de garde, notamment à Evreux et à Noyon, dans l'Oise, ont été accueillis dans certains quartiers à coups de pierres, et leur voiture a été défoncée. Dans le courant de l'année, une dizaine d'incidents de ce type ont été recensés par SOS-Médecins à Strasbourg. Enfin, une pharmacienne d'Epinay-sur-Seine a été assassinée au mois de février dernier à coups de couteau dans son officine.
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