C ELA pourrait ressembler à une peinture de Van Gogh : des champs d'oliviers, l'éclat d'une rivière, des pieds de vigne à perte de vue. Conscients de leur fortune, les habitants d'Entraigues-sur-la-Sorgue et des communes avoisinantes n'apprécient pas que le tableau de leur Provence soit saboté par l'implantation d'une déchetterie.
C'est pourtant ce que prévoit l'arrêté préfectoral du 7 juillet 2000, sur un terrain de 100 hectares situé à Entraigues mais qui appartient à la puissance étatique puisqu'il s'agit d'un ancien site de dépôt de munitions, réquisitionné après la Seconde Guerre mondiale. Après l'abandon de deux projets, une clinique et un centre pénitentiaire, c'est finalement celui d'un centre de stockage de déchets ménagers et assimilés qui a été retenu sur un ensemble de 30 hectares. Une décision qui n'a pas eu l'heur de plaire au voisinage.
Deux recours administratifs ont été déposés au tribunal administratif : le premier venant d'un propriétaire dont l'exploitation fruitière est accolée à ces 30 hectares, et le second, d'un collectif de trois associations de riverains des communes d'Entraigues-sur-Sorgue, de Vedène et de Saint-Saturnin. « Fondamentalement, nous ne sommes pas contre le fait de traiter les déchets, explique le président d'une de ces associations, Jacques Perri. Ce qui nous dérange, c'est le lieu qui a été choisi pour l'implantation de cette déchetterie ».
Des risques de pollution ?
Lors de l'enquête publique, le collectif a fait parvenir aux autorités administratives un document rédigé à l'appui de l'expertise d'un ingénieur écologue, dont les conclusions contredisent les expertises transmises, d'une part, par le pétitionnaire (SITA Sud), d'autre part, par le maire d'Entraigues-sur-Sorgue et, enfin, par la direction régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement (DRIRE). « L'emplacement qui a été choisi, précise Jacques Perri, est un terrain inondable. La présence d'une nappe phréatique très proche, voire par endroit affleurante, présente un risque de pollution non négligeable ». Et les précautions prises par SITA Sud (entre autres, installation d'une géomembrane, mise en place d'un remblai de perméabilité et d'une couche de matériaux argileux) ne satisfont pas les défenseurs du site, soutenus par les Verts du Vaucluse. D'autant que plusieurs menaces, selon eux, s'ajoutent à ces craintes : risques pour la santé publique du fait de la prolifération d'oiseaux et de rongeurs, impact sur le paysage du fait de la hauteur de la décharge et odeurs nauséabondes causées par les émissions de biogaz de la déchetterie.
Du côté des autorités administratives, on oppose les garanties fournies par la société de déchets. « C'est un projet qui a été vu à la loupe et dont l'instruction a duré près de trois ans, confirme la directrice adjointe de la direction départementale des Affaires sanitaires et sociales (DDASS). Le préfet a été très exigeant. En fait, nous avons beaucoup de difficultés à convaincre sur ce genre de dossier. Les déchets font peur : nous sommes dans le même contexte que celui qui touche au nucléaire. Mais le projet de la décharge a été conçu pour prévenir toute forme de pollution ».
Les autorités administratives se retranchent, en outre, derrière la décision du tribunal administratif. Les deux premiers recours déposés contre l'arrêt préfectoral viennent d'être en effet rejetés. « Le tribunal administratif n'a pas jugé nécessaire de surseoir à l'exécution des travaux de la déchetterie. Cette décision prouve en tout cas qu'il n'y a pas eu de vice de forme et que le dossier a été mené comme il faut, répond-on à la DDASS. On a vraiment l'impression que tout a été prévu : la probabilité d'un effet néfaste est très infime. Mais comme dans tout projet, le zéro défaut n'existe pas ».
Toutefois, les riverains ne semblent pas se contenter de cette éventualité et sont déterminés à poursuivre leur combat judiciaire.
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