La semaine dernière, l’InVS rapportait une augmentation des passages aux urgences en lien avec la canicule.
Quel fut l’impact réel de ce premier épisode de canicule sur les services d’urgence ? Nous avons demandé au Pr Pascal Bilbault, qui dirige les urgences médico-chirurgicales pour adultes du CHRU de Strasbourg. Avec la Lorraine et l’Auvergne, l’Alsace fait partie des régions françaises où la canicule s’est fait le plus durement ressentir.
Le Quotidien : Dans quelle mesure la canicule a-t-elle eu un impact sur votre activité ?
Pr Pascal Bilbault : Il y a eu un impact important à partir du mardi 30 juin. En volume, notre activité a augmenté de 20 %, mais c’est un résultat en trompe l’œil. Le nombre de patients qui venaient aux urgences pour des pathologies locomotrices a baissé de 15 %. Ils ont été « remplacés » par des patients venant pour des pathologies liées à la chaleur, la plupart du temps une baisse brutale de leur état général ou pour une chute liée à une hyperthermie.
Le taux de passages des personnes âgés a, lui, augmenté de 35 %, or ce sont des personnes qui sont hospitalisées dans 80 % des cas. Au final, cela a représenté une hausse d’environs 24 % du nombre d’hospitalisations entre le 1er et le 7 juillet.
Comment vous êtes-vous adaptés ?
Nous avions anticipé cet épisode caniculaire grâce aux alertes de l’InVS. Dès le 26 juin, nous avons mis en place une cellule de crise qui se réunissait deux fois par jours. De manière générale, c’est une période pendant laquelle il est prévu de réduire le nombre de lits d’hospitalisation, mais nous avons compensé en armant des lits de chirurgie – profitant du fait que l’activité de chirurgie se réduit en été. Nous nous sommes aussi efforcés d’orienter rapidement les patients pour ne pas emboliser les urgences.
Cet épisode était-il différent de ceux de 2003 ou 2006 ?
En 2003, on avait beaucoup de coups de chaleur. Cette année, nous n’avons eu que trois cas de patients, dont deux sont décédés. Les urgentistes nous ont cependant signalé plusieurs décès en réanimation préhospitalière. Nous avons eu beaucoup moins de déshydratations aussi, les consignes sur l’hydratation des pensionnaires des maisons de retraites sont très bien suivies. Les seuls patients déshydratés qui nous sont parvenus étaient des personnes âgées qui vivaient dans leurs propres domiciles.
En revanche nous avons eu beaucoup de patients en état d’épuisement, avec des décompensations de leurs pathologies chroniques. Il s’agit de personnes de plus de 75 ans, plutôt bien conservées, mais qui souffrent de diabète, d’insuffisance cardiaque ou rénale, ou qui prennent des diurétiques pour une hypertension. Ils sont épuisés quand il fait 29 °C pendant la nuit.
Une autre différence notable était l’absence d’hypernatrémie, alors qu’on avait des hypernatrémies à 170 ou 180 mmol/l l’année dernière. Au contraire, on observe des cas d’hyponatrémies modérées à un peu moins de 130 mmol/l. Nous sommes en train d’essayer de comprendre pourquoi, mais une possibilité est qu’on a donné beaucoup d’eau à boire aux patients. On sait aussi qu’il y a des réductions de durées de prises de diurétiques qui peuvent jouer.
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