C' EST une proposition intéressante que celle de Jean-Philippe Lucas qui lie deux textes de Pirandello qui n'ont pas directement à voir mais nous offrent une progression sourde de l'angoisse.
Dans « l'Etau », on retrouve l'une des obsessions de l'écrivain : la trahison conjugale, la dissimulation. L'amant, parti en voyage d'affaires avec le mari, qui est aussi son meilleur ami, le précède pour prévenir sa maîtresse : l'époux a tout compris. Il interprète d'infimes détails, des gestes quotidiens, comme autant de messages à double-entente, comme autant de menaces. La panique le saisit. La jeune femme ne veut rien entendre. Elle attend son époux... qui arrive avec des cadeaux pour les enfants et une sorte de détachement qui la terrorise peu à peu, jusqu'à la révélation.
C'est bref, angoissant, inquiétant. Si les femmes, Marie-Laudes Emond, Giulia et Aurélie Fouquet, Anna, ont quelque mal à trouver leur place (rôle très difficile que celui de l'épouse), les deux interprètes masculins, Jean-Marc Talbot, l'amant, Maxime Leroux, le mari, sont très bien. Talbot dans la panique et une certaine lâcheté, Leroux dans quelque chose de cruel qui se précise peu à peu, une ambivalence qui met mal à l'aise. Il torture. Il se venge.
« La Fleur à la bouche » vient d'une nouvelle intitulée « Ouvert la nuit ».
Deux hommes. L'un a raté son train et doit attendre le matin pour pouvoir s'en aller (Jean-Marc Talbot) ; l'autre souffre d'épithélioma et est condamné par les médecins (Maxime Leroux). Ce dernier lutte, tente de saisir les sensations qui l'assaillent et ne peuvent se circonscrire à la peur de mourir.
Il y a dans ce petit texte, un monologue pour l'essentiel, la densité d'une uvre insolite dans laquelle seraient contenues toutes les angoissantes questions qui trament l'univers dramatique de Luigi Pirandello. Maxime Leroux se plie avec intelligence et sensibilité aux régimes contrastés de la pensée de cet homme lucide qui ne veut que le pur présent, prétend-il...
Théâtre 13, à 20 h 30 du mardi au samedi, à 15 h 00 le dimanche. Durée : 1 h 30 sans entracte (01.45.88.62.22). Jusqu'au 8 avril.
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