L'intérêt du scanner hélicoïdal pour diagnostiquer les syndromes appendiculaires
LE QUOTIDIEN - La clinique a-t-elle toujours la même valeur d'orientation dans le diagnostic des syndromes appendiculaires à l'heure actuelle ?
Pr JEAN-LUC BOUILLOT - La triade fièvre supérieure à 38 °, réaction pariétale à la palpation abdominale et hyperleucocytose supérieure à 12 000 GB/mm3 reste très évocatrice*. Devant un tel tableau, le chirurgien ne se pose pas de question : il opère. Il est préférable d'enlever un appendice sain plutôt que de passer à côté d'une appendicite vraie qui risque de se transformer en péritonite.
Lorsque les signes cliniques ne sont pas très typiques, que préconisez-vous comme examens radiologiques complémentaires ?
L'ASP réalisé systématiquement devant tout syndrome abdominal douloureux aux urgences ne sert pas à grand-chose, sauf si l'on recherche un pneumopéritoine (ulcère perforé) ou des signes d'occlusion.
L'échographie n'est fiable que si elle est positive et sa valeur prédictive négative est très mauvaise : si elle ne révèle rien de particulier, une fois sur trois ou sur quatre, il y a une appendicite. Elle risque d'être faussement rassurante. En pratique, l'échographie est relativement peu utilisée sauf chez les enfants et chez les femmes de 15 à 45 ans dans les syndromes abdominaux douloureux, car elle permet de faire le diagnostic différentiel entre salpyngite, kyste de l'ovaire et pathologie annexielle.
Quelles sont les indications du scanner hélicoïdal ?
Lorsque les signes cliniques ne sont pas typiques, le recours au scanner est intéressant. Jusqu'à présent, devant une discordance entre la clinique et les examens, la règle était d'opérer même s'il persistait un doute. Cela a conduit à enlever un certain nombre d'appendices normaux (environ 20 %), pourcentage semble-t-il plus important en France que dans d'autres pays. D'où l'intérêt dans ces cas litigieux d'avoir recours au scanner, globalement très fiable. D'après l'enquête que nous avons menée chez 100 patients hospitalisés pour suspicion d'appendicite, le scanner a été à l'origine de quelques faux-négatifs, mais il s'agissait d'appendicites distales, d'endo-appendicites aiguës ou d'appendicites chroniques pour lesquelles la décision opératoire pouvait attendre.
Le scanner dit hélicoïdal permet d'avoir des coupes plus fines et plus rapides, les images sont de meilleure qualité.
Au total, quelle est la conduite à tenir à l'heure actuelle ?
Quand le tableau chirurgical est typique, on opère, sans faire de scanner. Dans les cas douteux, il faut demander un scanner. Deux cas de figure se présentent : si le scanner est positif (lire encadré), l'indication chirurgicale est posée ; en revanche, s'il est négatif, on peut laisser repartir le patient à son domicile en lui demandant de revenir à la 24e heure en cas de besoin ; à ce moment-là, si les signes cliniques sont toujours présents, on décide en général d'opérer.
Faut-il prôner le scanner systématiquement en première intention ?
Non certainement pas, d'abord car le scanner n'est pas accessible partout : de nombreux centres d'urgence n'en sont pas équipés. Il n'est pas question à l'heure actuelle de demander un scanner pour toute suspicion d'appendicite, surtout quand la clinique est vraiment typique. Mais la question de la rentabilité reste posée, car si l'on compare, comme l'a fait l'équipe de Nancy, le coût des explorations menées chez un groupe de patients qui a eu successivement un ASP, puis parfois une échographie, et éventuellement un scanner, à un autre groupe pour lequel on a réalisé un scanner d'emblée, le coût est sensiblement le même. En effet, les patients chez lesquels le scanner était positif ont été pris en charge et opérés plus vite que les autres et, inversement, lorsque le scanner était négatif, des hospitalisations inutiles pour surveillance ont été évitées.
Propos recueillis auprès du Pr Jean-Luc Bouillot, hôpital Hôtel-Dieu, Paris.
* Conférence de consensus de l'ANAES en 1997.
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