RGO de l'adulte : l'impact des conférences de consensus reste insuffisant
L E jury de la conférence de consensus franco-belge, avant d'émettre des recommandations sur le RGO de l'adulte aux médecins généralistes (MG) français, en janvier 1999, a décidé d'effectuer une enquête de type « avant-après » afin de comparer les connaissances et attitudes thérapeutiques des MG dans cette pathologie.
Une première enquête a été réalisée deux mois avant la CC, en novembre 1998, et une seconde en janvier 2000, soit un an après la diffusion des recommandations de la CC par la presse médicale généraliste et spécialisée. Les deux enquêtes successives étaient basées sur un questionnaire portant sur la fréquence du RGO et sa prise en charge diagnostique et thérapeutique ; le questionnaire a chaque fois été soumis à un échantillon représentatif de 500 MG français. Les pourcentages de réponses aux 10 questions ont été comparés entre les deux enquêtes par un test de chi-2. Le pourcentage de MG qui ont répondu lors de la première et de la seconde enquête est, respectivement, de 36 % et 30 %.
Un an après la diffusion des guidelines de la CC, la proportion de médecins qui estime poser le diagnostic de RGO plus de cinq fois par semaine a triplé (15 % vs 3 % lors de la première enquête (p < 0,0001) ; de même, 75 % des MG pensent que la spécificité du symptôme « régurgitations » est suffisante pour porter le diagnostic, contre 61 % sur le questionnaire précédent (p < 0,006).
Les examens paracliniques
En ce qui concerne les examens paracliniques, il n'y a pas de différence entre les deux enquêtes, 49 % en moyenne des MG déclarent prescrire souvent une endoscopie alors qu'environ 34 % d'entre eux n'en demandent jamais. Le pourcentage de MG qui considèrent que l'intensité initiale des symptômes (30 %), la sévérité de l'sophagite (90 %) et le caractère très pathologique de la pHmétrie (70 %) sont des facteurs prédictifs d'une évolution chronique et/ou récidivante est comparable aux deux enquêtes. Après la diffusion des guidelines de la CC, un plus grand nombre de MG (58 % vs 42 % ; p < 0,001) déclarent adopter une stratégie de step-down - pour laquelle le traitement supposé le plus actif est choisi dans un premier temps et suivi de la prescription de la thérapeutique minimale efficace. Par ailleurs, davantage de MG prescrivent en première intention des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) à demi-dose (48 % vs 32 % ; p < 0,002) ou pleine dose (28 % vs 15 % ; p < 0,006), puis les alginates, anti-H2 et prokinétiques ; l'efficacité de ces médicaments est jugée comparable pour les deux enquêtes, à l'exception des prokinétiques estimés moins efficaces lors de la seconde enquête.
Lors de la seconde enquête, davantage de MG estiment que la chirurgie clioscopique permet la même opération que l'intervention à ventre ouvert (54 % vs 44 % ; p < 0,002), qu'elle est suivie d'une morbidité moindre (82 % vs 61 % ; p < 0,0001) et qu'elle permet d'élargir les indications chirurgicales du RGO (68 % vs 51 % ; p < 0,002).
Des données déclaratives
Sur le plan méthodologique, ces enquêtes encadrant la diffusion des recommandations de la CC sont basées uniquement sur des données déclaratives ; or, on sait que cette démarche reflète imparfaitement les attitudes cliniques réelles. Par ailleurs, l'absence de comparaison entre des MG ayant reçu les recommandations et un groupe contrôle n'en ayant pas eu connaissance constitue certainement un défaut de cette étude.
Ce travail montre qu'à distance de la CC les MG semblent mieux connaître et reconnaître le RGO, qu'ils recourent significativement plus souvent aux IPP en première intention et qu'ils adoptent plus fréquemment une stratégie du type step-down. Cependant, le niveau des connaissances est jugé encore insuffisant et non conforme aux recommandations de la CC, notamment en ce qui concerne la spécificité diagnostique des signes d'appel et les choix thérapeutiques retenus. Il est globalement admis que la diffusion isolée des conclusions des CC est inefficace pour modifier les pratiques de prescription. Une vaste étude* récente suggère que le niveau d'adhésion aux recommandations des CC pourrait être amélioré par divers facteurs combinés : elle cite notamment la participation des praticiens au processus d'élaboration des guidelines et la mise au point de systèmes informatiques d'aide à la décision et à la prescription.
D'après un entretien avec le Pr Jean-François Bretagne, CHU Pontchaillou (Rennes).
* « Mise en uvre des recommandations médicales : revue systématique des revues systématiques » P. Durieux et coll, « Gastroentérol. Clin. Biol. », 2000, 24, pp. 1018-1025.
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