Pancréatite aiguë récidivante : rechercher une mutation du gène CFTR
A U cours des pancréatites chroniques et des poussées de pancréatite aiguë récidivante, il arrive que dans une minorité de cas (15 %), on ne trouve pas les causes habituelles : l'alcoolisme pour les pancréatites chroniques, l'alcoolisme et la lithiase biliaire pour les pancréatites aiguës ; voire des causes plus rares - auto-immunes, métaboliques ou tumorales. On sait que certaines pancréatites peuvent être d'origine génétique : il existe des formes familiales, qui sont liées à une mutation d'un gène d'une enzyme, le trypsinogène cationique. On sait également que, au cours de la mucoviscidose avérée de l'enfant ou de l'adulte jeune, des manifestations pancréatiques liées à une mutation sur le gène CFTR, responsable de la mucoviscidose et qui gouverne un canal de passage du chlore, peuvent se produire.
Un prélèvement sanguin d'ADN
Le travail mené à l'hôpital Beaujon, réalisé en collaboration avec le Dr Bienvenu, a porté sur 28 patients atteints de pancréatite chronique inexpliquée ou de poussées de pancréatite aiguë qui récidivaient sans cause apparente. Son objectif était de mettre en évidence la présence ou non d'une mutation sur le gène de la mucoviscidose chez ces patients, susceptible d'être impliquée dans la survenue de la pancréatite. A partir d'un prélèvement sanguin d'ADN, le laboratoire de génétique moléculaire de l'hôpital Cochin recherchait l'existence de 31 mutations sur le gène CFTR.
Les résultats ont montré que 7 malades sur 28 (25 %) présentaient une mutation sur au moins l'un des deux allèles du gène CFTR. Un malade avait une mutation hétérozygote composite : il présentait une mutation différente sur les deux allèles dont l'une était la mutation majeure delta F508, caractéristique de la mucoviscidose. Les six autres malades étaient hétérozygotes : ils avaient un allèle normal et un allèle muté. L'analyse du sous-groupe de malades jeunes (< 35 ans), chez lesquels on pouvait supposer une plus grande fréquence d'une maladie génétique sous-jacente, a montré que la proportion de malades ayant une mutation du gène CFTR atteignait 50 %, alors qu'elle n'est que de 6 % chez les malades âgés de plus de 35 ans. La différence est statistiquement significative.
Des mutations plus fréquentes chez les sujets jeunes
Ainsi, chez un patient âgé de moins de 35 ans qui souffre d'une pancréatite chronique ou de poussées de pancréatite aiguë, on a une chance sur deux de trouver une mutation sur l'un des allèles du gène CFTR. Cette étude a également montré que l'expression de la maladie n'est pas significativement modifiée, que l'un des allèles soit muté ou non. La gravité des poussées de pancréatite aiguë est la même, que les malades aient une mutation ou non. Les pseudo-kystes du pancréas, qui sont l'une des complications de la pancréatite, ne sont pas plus fréquents dans un groupe que dans l'autre. Enfin, les signes d'insuffisance pancréatique - diabète et diarrhée graisseuse - sont peu fréquents dans les deux groupes, et il n'y a pas de fréquence supérieure d'un groupe par rapport à l'autre.
Ainsi, en cas de pancréatite idiopathique, un malade sur quatre a au moins une mutation du gène CFTR, ce qui est plus fréquent que dans la population générale. La signification exacte d'une telle mutation devra être précisée par des travaux ultérieurs. Chez les patients qui révèlent tôt leur maladie pancréatique, l'existence d'une mutation est un facteur très important à prendre en compte.
D'après un entretien avec le Pr Philippe Ruszniewski, chef du service de gastroentérologie, et le Dr Frédérique Maire, hôpital Beaujon, Clichy.
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