« Nous n’avons pas répondu à la lettre de mission de Marisol Touraine qui demandait une actualisation des recommandations sur la prise en charge médicale des personnes infectées par le VIH, nous avons préféré parler de personnes vivant avec le VIH », a expliqué le Pr Philippe Morlat lors de la présentation, ce mercredi, de l’édition 2013 du rapport dont il a assuré la direction.
Le praticien bordelais a été chargé par le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites (ANRS) et le Pr Patrick Yéni, président du Conseil national du sida de coordonner les travaux du groupe d’experts chargé d’élaborer les nouvelles recommandations. Ce dernier, pour la première fois depuis la première édition de 1990, n’était pas directement rattaché au ministère de la Santé, celui-ci ayant voulu dissocier les deux fonctions. « Dans la mesure où il était effecteur, il n’a pas souhaité être concepteur », a expliqué le Pr Patrick Yéni président du Conseil national du sida.
Autre nouveauté de cette édition, les 21 cliniciens dont un médecin généraliste, biologistes, scientifiques et les 2 représentants du milieu associatif ont été choisis conformément aux principes de la loi du 29 décembre relative au renforcement de la sécurité sanitaire et des produits de santé, notamment ceux concernant les liens d’intérêt. « Le groupe a été profondément renouvelé », a souligné le Pr Yéni.
Une maladie chronique
Plus qu’une boutade, la remarque du Pr Morlat sur les personnes vivant avec le VIH plutôt qu’infectées par le VIH traduit une des évolutions majeures de l’épidémie de sida. « Une fois traité, les problèmes posés par l’infection par le VIH sont ceux d’une maladie chronique », souligne le Pr Morlat. Malgré les traitements efficaces, « l’épidémie n’est toujours pas contrôlée et le nombre de nouvelles contaminations ne baisse pas », poursuit le Pr Morlat.
On estime que 150 000 personnes vivent en 2010 en France avec le VIH dont 115 000 sont connues et prises en charge, 9 600 diagnostiquées mais échappent au système de soins et 28 000 ignorent leur séropositivité. Ces derniers seraient à l’origine de 60 % des nouvelles contaminations.
Le rapport du groupe d’experts préconise un traitement précoce, dès le diagnostic d’infection à VIH. Une telle approche se justifie en termes de bénéfice individuel. « Les études de cohorte sont très claires et montrent qu’en dessous de 500 CD4, le bénéfice individuel est parfaitement démontré. Au-dessus de 500 CD4, le niveau de preuves est plus faible mais de nombreux arguments indirects montrent que plus on traite tôt, moins le système immunitaire se dégrade et mieux il se restaure », souligne le Pr Morlat.
En termes de bénéfice collectif, la nouvelle stratégie valide l’utilisation des ARV à des fins préventives (Treatment as Prevention). « Les représentants des associations nous ont fait remarquer qu'un séropositif, s'il sait que bien traité il ne transmet pas le virus, cela est perçu comme un bénéfice pour lui-même. Cela pourrait même faire évoluer la perception sociale de la maladie », explique le président du groupe d’experts.
Réduire le nombre de nouvelles infections
Le traitement précoce fait partie de la stratégie défendue par le groupe d’experts d’une prévention combinée associant la prévention comportementale classique (préservatifs, choix du partenaire ...), le traitement post-exposition, le traitement pré-exposition mais aussi le dépistage.
Plutôt qu’un dépistage systématique, le rapport préconise un dépistage large mais ciblé, proposé par les médecins généralistes et les spécialistes, quel que soit leur mode d’exercice, lors d’un recours aux soins de personnes sans test récent. Le rôle des médecins généralistes est alors essentiel. Le rapport préconise de développer les tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) en dehors des lieux traditionnels de dépistage et de préparer l’arrivée sur le marché des autotests, déjà commercialisés aux États-Unis.
« L’espoir est de réduire à terme l’épidémie et le nombre des nouvelles infections », insiste le Pr Morlat. Le Pr Jean-François Delfraissy pour sa part, souligne l’importance de ce rapport qui permet à toute personne vivant avec le VIH de bénéficier de la même prise en charge quelle que soit le lieu où elle se trouve. Il rappelle que contrairement aux États-Unis où seulement 20 % des personnes prises en charge ont une charge virale indétectable, « 58 % des personnes traitées en France parviennent à ce stade ».
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