Dans quelle mesure les Français sont-ils exposés aux pesticides, même ceux qui sont interdits depuis des années ? L’Institut de veille sanitaire (InVS) publie les résultats détaillés de la première étude d’imprégnation des adultes. L’exposition à 11 métaux avait déjà fait l’objet en mars 2011 du tome I du rapport « Exposition de la population française aux substances chimiques de l’environnement » établi dans le cadre de l’Étude nationale nutrition santé (ENNS) lancée en 2007. Le tome II rapporte les conclusions de la biosurveillance exercée sur un échantillon de 400 personnes âgées de 18 à 74 ans. Des biomarqueurs de 6 PCB et 3 familles de pesticides ont été recherchés dans les urines, les cheveux, ou encore le lait maternel.
PCB : 13 % des femmes en âge de procréer surexposées
Les polychlorobiphényls non dioxin-like (PCB-NDL), présents dans les transformateurs électriques, les encres ou les peintures, ont été interdits en 1987 car accusés d’être à l’origine de lourdes pathologies chroniques ou de troubles du comportement, du développement, et de la fertilité. En l’espace de 20 ans, la concentration sanguine de PCB a été divisée par 3. Mais l’héritage historique reste présent.
Selon l’InVS, 13 % des femmes de 18 à 45 ans, et moins de 1 % des adultes ont une concentration de PCB totaux supérieure aux seuils définis par l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) : 700 ng/g de lipides plasmatiques – les PCB s’accumulent en effet dans l’organisme au niveau des tissus adipeux – pour les femmes en âge de procréer, et 1 800 ng/g de lipides plasmatiques pour les autres adultes.
Ces concentrations de PCB placent la population française dans une situation comparable à celles d’autres pays d’Europe. L’exposition y serait même globalement supérieure, et surtout 5 fois plus élevée qu’aux États-Unis, où la consommation de poisson est bien moindre. L’alimentation, notamment de produits de la pêche, de viande et de produits laitiers, est en effet la principale source d’exposition aux PCB. En janvier 2012, l’ANSES recommandait aux femmes enceintes et aux enfants de limiter leur consommation des espèces bio-accumulatrices (anguilles, barbeaux, brèmes, carpes, silures) à 1 fois tous les 2 mois.
Insecticides dans les urines
L’InVS a aussi évalué la présence de certaines familles de pesticides dans le sang et les urines. Pour les organochlorés, dont la plupart sont interdits mais persistent dans l’environnement (comme l’insecticide DDT, Indane), les concentrations sont relativement basses. L’institut y voit l’effet positif d’interdictions déjà anciennes. Le DDT est banni depuis 1971.
En revanche, pour les autres familles de pesticides, les concentrations urinaires de métabolites (produits de dégradation) sont plus élevées. Pour les organophosphorés (efficaces contre les insectes et acariens), elles sont inférieures à celles retrouvées dans la population allemande, mais supérieures à celles des Américains et Canadiens.
Quant aux pyréthrinoïdes, très utilisés dans le traitement des cultures et des applications domestiques (pesticides dans un potager, traitements antipuces...), les concentrations sont plus élevées qu’en Allemagne, au Canada, et aux États-Unis.
L’association « Générations futures » rappelle que beaucoup d’insecticides organophosphorés et pyréthrinoïdes sont suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. Elle appelle le gouvernement français et l’Union européenne à prendre des mesures pour supprimer l’exposition des citoyens à ces pesticides.
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
Dès 60 ans, la perte de l’odorat est associée à une hausse de la mortalité
Troubles du neurodéveloppement : les outils diagnostiques à intégrer en pratique
Santé mentale des jeunes : du mieux pour le repérage mais de nouveaux facteurs de risque