COMMENT se débrouillent les soignants en santé mentale pour assurer l’accès aux soins des populations précaires, désocialisées, errantes, migrantes, souffrantes mais rétives à toute prise en charge ? Peut-on soigner un SDF schizophrène, alcoolique et hostile à toute approche d’un psychiatre ? Comment assurer la chimiothérapie d’un migrant sans papiers atteint d’une leucémie qui n’accepte qu’au prix d’âpres négociations de rester dans son foyer d’hébergement ?
Ces questions issues de la pratique quotidienne résument l’interrogation d’un séminaire où la question du logement s’est révélée centrale : « habiter » reste bel et bien une condition de l’identité, de la sécurité, nécessaire à la construction du soin. Pour les soignants des équipes mobiles – elles sont une centaine en France, toutes très différentes dans leur nature et leur fonctionnement - et pour ceux qui, travailleurs sociaux et soignants, exercent au sein des structures d’hébergement des personnes précaires, il y a là une évidence : pas de soin sans toit.
Des lits Halte santé.
« Les "exclus" poussent rarement les portes des lieux de soins, ils n’ont jamais été consommateurs de psy, et il y a longtemps qu’ils ne croient plus aux structures psy traditionnelles », insiste le Dr Michel Bon, psychiatre hospitalier (hôpital Saint-Jean-de-Dieu) et responsable de l’Interface SDF de Lyon, première équipe mobile crée en France en 1997, bien avant que la loi vienne formaliser le dispositif.
« Cela ne veut pourtant pas dire qu’ils sont sans territoire. Certes, ils sont errants, mais c’est à nous d’aller au-devant d’eux : nous intervenons toujours à la demande de médiateurs (assistants sociaux, éducateurs etc.), et c’est avec le maillage de tous les intervenants que nous les aidons, souvent après rechutes et défaillances, à retrouver un domicile ». Le Dr Bon travaille également avec la Maison Hestia, à Villeurbanne, en banlieue lyonnaise, ouverte en décembre 2007, qui dispose d’une trentaine de « Lits Halte Santé » et accueille pour deux mois maximum (en réalité souvent le double), SDF et personnes en errance, ou migrantes, qui lui sont adressés par l’hôpital pour un traitement, une convalescence.« Chez nous cohabitent migrants et errants, deux populations qui nous renvoient en permanence à l’impossible », constate avec une ironie teintée d’amertume le Dr Dominique Blondeau, son directeur, médecin généraliste. Les premiers parce qu’on ne pourra jamais « leur offrir tous les soins dont ils devraient bénéficier, et a fortiori les fameux papiers dont ils rêvent qui leur permettront de ne plus craindre la police ». Les seconds « parce qu’ils sont tout bonnement impossibles à soigner… ».
Contourner les obstacles.
Notre rôle au quotidien, avec l’équipe, ajoute le Dr Blondeau, consiste à « gérer les soins des patients résidants même s’ils sont étiquetés SDF » mais aussi à « veiller à ce que leur alcoolisme, fréquent, ne vienne pas perturber le fonctionnement de la structure ». Mais, nuance le directeur, « mon combat central, quotidien, de médecin, est de veiller à ce que ces patients soient pris en charge par le système de soins au même titre que tous les autres citoyens. Nous nous confrontons en effet aux mêmes problèmes que la population générale : pas simple d’avoir un rendez-vous à l’hôpital, pas simple d’obtenir une radio quand l’hôpital vous renvoie sur un cabinet de radiologie privé ! Certains droits ne leur sont pas ouverts aisément, et nous constatons une augmentation des refus de soins, y compris à l’hôpital public. Alors nous nous débrouillons, avec l’aide de l’assistante sociale et celle des confrères, un peu partout en ville, pour contourner les obstacles... ».
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