EN CETTE PÉRIODE de crise, le durcissement des inégalités ne faiblit pas. Cette année encore, les chiffres de l’INSEE sont criants : les riches sont toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres. En 2009, le quart des revenus salariaux* les plus hauts sont 10 fois plus élevé que le quart des plus faibles. Certes, le revenu salarial moyen a progressé de 0,8 % en moyenne par an entre 1995 et 2009 (grâce à l’augmentation des durées d’emploi des bas revenus), mais le fossé entre les deux extrêmes ne se comble pas. Le revenu salarial des 1 % les mieux rémunérés croît plus rapidement que tous les autres et leur part dans la masse salariale totale est passée de 6,1 à 6,6 % entre 1995 et 2009, malgré la crise. Les 10 % des ménages les plus riches reçoivent 69 700 euros par an, soit 16 fois plus que les 10 % moins riches.
Néanmoins, le système socio-fiscal de redistribution à l’œuvre réduit dans une certaine mesure ces inégalités. Avant son application, le revenu moyen des 20 % des personnes aisées (estimé à 53 500 euros par unité de consommation) est 7,2 fois supérieur à celui des 20 % les plus modestes (7 500 euros). Une fois les prélèvements acquittés (impôt sur le revenu, taxe d’habitation, contribution sociale généralisée...) et les prestations versées, le rapport entre les 2 extrêmes des niveaux de vie est divisé de moitié et passe de 7,2 à 3,9. Les prestations sociales sont aux 2/3 responsables de cette atténuation des inégalités. Plus précisément, les aides familiales y contribuent pour 26 %, celles pour le logement pour 18 % et les minima sociaux pour 17 %. Parmi les prélèvements, qui y participent pour 1/3, l’impôt sur la fortune (22 %) a été ces vingt dernières années le levier d’action majeur.
Rôle accru du financement de la protection sociale.
« Le pouvoir redistributif de la fiscalité entre 1990 et 2010 est relativement stable, mais, avec les très nombreuses réformes qui se sont succédé, les canaux de la redistribution ont changé », explique Fabrice Lenglart, directeur des études sociales et démographiques. Les cartes ont en effet été rebattues, avec la création de la CSG en 1991, de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), de la prime pour l’emploi, du revenu de solidarité active en 2009, et avec les réformes de l’impôt sur le revenu (1993 et 2006). « Les effets se compensent », analyse Alexis Eidelman, de la division études sociales, pour comprendre la permanence de l’efficacité de la redistribution malgré ces bouleversements.
Premier fait notable, les prestations ont vu leur valeur s’éroder en étant revalorisées selon l’inflation, qui a augmenté moins vite que les revenus. Si elles restent le premier vecteur de redistribution, elles contribuent moins à réduire les inégalités. Et la création du RSA, l’harmonisation des allocations logement, ou la refonte des aides pour l’accueil du jeune enfant n’ont pas suffit à endiguer l’affaiblissement de leur rôle.
L’impôt sur le revenu a également perdu de son pouvoir redistributif en devenant moins progressif et en représentant un montant relativement faible par rapport aux revenus imposés. Il a en revanche été compensé par la création de la CSG et de la CRDS, qui ont une assiette d’imposition plus large, intégrant les revenus du patrimoine et non seulement du travail. À elle seule, la hausse des contributions et cotisations sociales de 1990 à 2010 représente une perte de 4 % du niveau de vie des 20 % les plus aisés, et une perte de moins de 1 % pour les 20 % les plus modestes.
Aujourd’hui, le système de redistribution poursuit sa métamorphose, qui laisse un rôle majeur au financement de la protection sociale. Les plans d’austérité ne semblent pas en démentir la tendance. Le gouvernement a annoncé son intention de revaloriser en 2012 les prestations familiales et les allocations logement en fonction de la croissance, et non plus de l’inflation, avec à la clef une augmentation de 1 % au lieu de 2,3 %. « Cela pourra avoir tendance à la marge à atténuer la réduction des inégalités mais d’autres mesures vont dans le sens inverse, comme le gel annoncé du barème de l’impôt sur le revenu », a nuancé Fabrice Lenglart.
* Somme de l’ensemble des salaires perçus sur un an, et non seulement le salaire horaire .
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