PRÉSERVATIF COLORÉ pour l’association de lutte contre le Sida AIDES, candidat agonisant sur un lit d’hôpital pour l’association pour la dignité de mourir (ADMD), buste de Marianne meurtri pour Médecins du monde (MDM), les grosses associations se sont adjoint les services d’agences de communication pour jouer la carte de la provocation. D’autres plus modestes ont envoyé des questionnaires ou des lettres ouvertes. Toutes ont poussé les candidats dans leurs retranchements au cours de cette campagne 2012.
AME, franchises, VIH.
Médecins du monde a été l’une des premières associations à jouer les trouble-fête en prescrivant aux candidats une ordonnance contre l’urgence sanitaire. Dès février, le Dr Olivier Bernard sensibilisait les conseillers santé, obtenant de Philippe Juvin (UMP) « l’étude » du refus de soins, et des socialistes, leur engagement à supprimer le droit d’entrée de 30 euros à l’aide médicale d’état.
AIDES a enfoncé le clou avec fracas. Au-delà des affiches juxtaposant préservatif et visage du politique au-dessus du slogan : « voici 2 moyens d’arrêter le sida. L’un a fait ses preuves, l’autre devra les faire en 2012 », l’association a envoyé un long questionnaire aux partis. Succès à gauche : François Hollande, Philippe Poutou, Jean-Luc Mélenchon, Éva Joly et le centriste François Bayrou évoquent la santé publique sur la plateforme seronet.com, animée par AIDES. « Certains états-majors commencent à nous connaître, nous sommes de plus en plus visibles et les candidats sont obligés de se mouiller », commente le président Bruno Spire. C’est sur ce site en effet que François Hollande s’est prononcé en faveur des expérimentations de salles de consommation supervisées, comme Eva Joly qui les juge « de bon sens et pragmatiques » ou Philippe Poutou. Le socialiste rejoint en revanche François Bayrou dans son refus de légaliser la consommation de drogues.
AIDES impose ensuite la question de la suppression des franchises médicales, que porte aussi le collectif interassociatif sur la santé (CISS). « En 2007, nous avions sorti des affiches des candidats avec la question : voteriez-vous pour moi si j’étais séropo. Cette année, nous avons un programme, nos militants veulent prendre part au débat », explique Bruno Spire. Interrogés, les 2 François contournent le sujet contrairement à Éva Joly et Jean-Luc Mélenchon, qui considèrent le dispositif comme une barrière à l’accès aux soins, voire un « impôt sur la maladie », selon Philippe Poutou.
L’ensemble des candidats de gauche plaident enfin pour une taxe Robin des bois sur les transactions financières au profit du développement et pour la relance de la politique de réduction des risques.
Fin de vie, handicap, sexualité.
Avec ses affiches marquantes, l’ADMD a réussi son coup : soumettre l’euthanasie à la discussion. Tous les politiques, mais également les associations opposées à cette cause ont dû se positionner. « En 2007, l’ADMD avait organisé une réunion à la maison de la chimie. Personne ne s’en souvient. Grâce à nos visuels, qui ont été repris dans le monde entier, nous sommes parvenus à mettre au cœur du débat démocratique, une question de liberté individuelle qui concerne tous les Français, et qui n’existait pas avant le débat parlementaire de 2009 », se félicite Philippe Lohéac, délégué général de l’ADMD.
Pas de campagne spectaculaire, mais 3 questions bien senties : l’association des accidentés de la vie (FNATH) a obtenu de tous les prétendants une déclaration en faveur de l’accessibilité du bâti public à l’horizon 2015. Pas de mesures originales néanmoins : François Hollande et Nicolas Sarkozy suggèrent la création d’une agence nationale chargée de l’accessibilité des bâtiments.
Les candidats se démarquent beaucoup plus sur la revalorisation des ressources. À l’extrême gauche, Jean-Luc Mélenchon, Nathalie Arthaud et Philippe Poutou défendent unrevenu minimum d’existence égal au SMIC pour les personnes en situation de handicap. L’écologiste Éva Joly promet à terme « la création d’un revenu d’existence qui fera l’objet dans un premier temps d’une expérimentation ». Marine Le Pen, plus circonspecte, étudie une augmentation de 33 % de l’AAH au cours du prochain quinquennat.
Du côté du non catégorique, François Hollande rejette l’idée d’un SMIC de remplacement et refuse de prendre des engagements précis. Nicolas Sarkozy, insistant sur l’augmentation de 25 % de l’AAH durant son mandat, n’annonce lui, aucune revalorisation à l’avenir.
« Sujet absent de tous les programmes », l’indemnisation des victimes du travail met en difficulté les candidats. Si la moitié s’engage à inscrire dans la loi la décision du conseil constitutionnel de juin 2010, qui accorde la réparation intégrale en cas de faute inexcusable de l’employeur, seul François Hollande et Éva Joly ont signé la pétition de la FNATH pour une loi juste.
Plus décalée, l’association CH(S)OSE, qui milite en faveur d’un accès à la vie affective et sexuelle des handicapés, n’a reçu aucune réponse, sur son site chs-ose.org dédié à la présidentielle.
Dépendance.
Chantier avorté de Nicolas Sarkozy, la réforme de la dépendance reste en sourdine dans la course à la présidentielle. Les candidats invoquent un plan ... sans engagement tangible. La Fédération nationale des associations de personnes âgées en établissements et de leurs familles (FNAPAEF) les a donc interpellés sur des enjeux précis : la discrimination à l’âge dans le traitement du handicap (avant 60 ans, le financement de l’accompagnement au domicile peut atteindre 7 000 euros contre 1 261 euros après 60 ans), la restructuration du secteur d’aide à domicile, le financement des EPHAD, et surtout la création d’une 5e branche de la sécurité sociale. « Jusqu’à présent, seul Dominique de Villepin qui s’est retiré nous a répondu ! La dépendance ne doit pas représenter une valeur électorale pour les candidats », regrette Joelle Le Gall, présidente de la FNAPAEF. « Le grand public n’a pas encore conscience de cet enjeu qui nous concerne tous », analyse-t-elle. Les torts sont partagés selon la présidente : le gouvernement multiplie les effets d’annonce, laissant croire aux citoyens que la question est entre de bonnes mains. Et les associations et professionnels « ont les mots d’un secteur spécialisé » ...
"NOS MILITANTS VEULENT PRENDRE PART AU DEBAT" EXPLIQUE AIDES
Plus médiatique, l’association France Alzheimer a, elle, obtenu les réponses des 10 prétendants, qui s’engagent, unanimement, à lancer un 4e plan Alzheimer et posent les pions d’une réforme de la dépendance. Les professions de foi ne vont pas au-delà des principes : solidarité et mutualisation du risque pour François Bayrou et Hollande, refus des assurances privées de la part d’Éva Joly et cotisation prévoyance dépendance pour Marine Le Pen.
Addictions.
D’autres associations ont participé, certes plus modestement, à introduire la santé publique dans le débat présidentiel. L’alliance prévention alcool demande que tous les contenants de boissons alcoolisés affichent « l’alcool est dangereux pour la santé », à la place du traditionnel « l’abus d’alcool ». Plus largement, l’association nationale de prévention en alcoologie et addictologie a envoyé un courrier à tous les candidats pour les alerter sur la prévention, « parent pauvre de toutes les politiques de santé depuis de nombreuses années ». L’ANPAA demande aux candidats de définir leur politique d’encadrement des psychoactifs, des produits illicites, et des jeux de hasards et d’argent, ainsi que leur position sur la loi du 31 décembre 1970 relative à la lutte contre la toxicomanie. L’écho reste faible : « Ce n’est pas le sujet le plus entendu, l’alcool reste tabou, les candidats sont très prudents sur les questions polémiques de toxicomanie », déplore le Dr Alain Rigaud, président national de l’ANPAA.
Éthique et mat.
L’éthique se hisse encore plus discrètement dans le débat. Pour la première fois depuis sa création en 1983, le comité consultatif national d’éthique (CCNE) interroge les candidats sur leur vision globale des enjeux de la science dans les domaines de la vie et de la santé. « Dans un grand pays démocratique tel que le nôtre, on ne peut concevoir qu’une profession de foi politique ne consacre une part prioritaire à ces questions d’éthique qui concernent chacun de nos concitoyens », écrit le président Alain Grimfeld, dans une lettre ouverte.
L’Union syndicale de la psychiatrie a enfin lancé une vaste pétition « pour un véritable droit d’opposition à l’informatisation de nos données personnelles », qui dénonce un « fichage tentaculaire » des citoyens et demande la transformation de la CNIL en une « commission nationale des libertés face à l’informatique » réellement indépendante. Jean-Luc Mélenchon, Eva Joly, sont signataires. « On trouve aussi quelques rares militants et élus socialistes », constate l’USPSY.
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