C’est un témoignage spontané, en forme de message d’alerte. Le Dr Didier Mayeur, oncologue médical à l’hôpital Mignot du Chesnay (centre hospitalier de Versailles), a confié aujourd’hui au « Quotidien » sa vive inquiétude au sujet de la prise en charge, cet été, des patients atteints de cancer ou de maladies hématologiques.
Le Dr Mayeur travaille au sein d’un service universitaire ayant une activité mixte de cancérologie et d’hématologie avec 16 lits d’hospitalisation traditionnelle, 15 lits de soins intensifs et 15 places d’hôpital de jour. Une équipe mobile de soins palliatifs est également en place. « Pour la première fois cette année, nous avons décidé, en accord avec la direction, de ne fermer aucun lit ni aucune place d’accueil pendant l’été, au regard de l’augmentation considérable de notre charge de travail et de notre file active », indique-t-il en plantant le décor du service. « Mais comme les équipes médicales prennent quand même quelques vacances, ceux qui restent sont en train de s’épuiser petit à petit. »
La goutte d’eau
Le service, dont l’activité augmente d’année en année entre 5 à 10 %, semble atteindre, cette année, ses limites : « par rapport aux quatre premiers mois de 2011, nous avons fait, fin avril, + 16 % de séjour. On ne sait plus où mettre les malades : on prend régulièrement des places en médecine interne infectieuse, en gastro, et on essaye de jongler avec les collègues des urgences. Un certain nombre de malades restent à l’unité de courte durée en attendant que l’on trouve des places. Les cadres de santé arrivent à faire des miracles », témoigne le Dr Mayeur. Voilà pour le contexte général.
Mais l’événement qui a fait réagir le Dr Mayeur, président du réseau territorial de cancérologie du sud des Yvelines, a eu lieu ce mardi. « Nous avons a eu deux appels du CHU de Saint-Antoine (Paris, 10e) concernant des leucémies aiguës pour lesquels il n’y avait aucune place à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Nous avons accueilli les malades : le premier habite Paris mais le second vient des Lilas, dans le 93. L’éloignement géographique n’est pas négligeable d’autant qu’il est parti pour un traitement d’induction, donc une hospitalisation de plus d’un mois pour une maladie curable (leucémie aiguë promyélocytaire de type LAM3). Nous n’avons pas pu prendre un malade de l’hôpital Béclère (Clamart), nous avons également refusé un malade de Nanterre », raconte le médecin.
Pas de concertation
Pire, « nous avons eu un appel de l’hôpital de Nevers (région Centre) et le même jour, à 22 heures, le médecin de garde reçoit un appel des urgences de Saint-Brieuc pour une leucémie aiguë. L’urgentiste s’arrachait les cheveux car il n’y avait aucune place sur toute la région Grand Ouest. Tout ça me fait tirer la sonnette d’alarme : où vont aller ces malades ? C’est, à l’évidence, une perte de chance potentielle car le retard à la prise en charge sur une maladie rapidement évolutive peut avoir des conséquences. Et nous n’étions que le 10 juillet ! Pour le mois d’août, je ne sais pas comment nous allons faire ! », s’alarme le praticien qui ne comprend pas l’absence de concertation au niveau local sur les fermetures de lit en particulier pour les pathologies les plus sévères.
« L’hôpital de Versailles a fait l’effort de ne pas fermer de lit cette année. Sommes-nous les seuls dans ce cas ? Par rapport à l’année dernière, on va pouvoir offrir presque 900 jours d’hospitalisation en plus sur la période estivale. Que fait-on des patients ? On dit tout le temps que les urgences sont saturées, mais ce ne sont pas les seuls services à coincer », s’agace-t-il.
Alors que les autorités de tutelle ne parlent que de coordination du parcours de soin, le Dr Mayeur s’interroge : « Comment peut-on coordonner les parcours de soins quand il n’y a déjà pas de place pour hospitaliser les malades qui en ont besoin. C’est une vision technocratique et des mots qui sonnent creux. Il faut cibler correctement, au moins au niveau régional, les services où l’on ferme des places. Sans quoi, il faut que le grand public sache qu’on va laisser des malades à la porte des établissements de santé. Ça me fait franchement peur. »
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