Deux des auteurs de "Casser l’euro" (1), Benjamin Masse-Stamberger et Frank Dedieu, avaient déjà sonné, il y a peu, la charge contre la mondialisation. Ils poursuivent la tâche qu’ils se sont assignée en bombardant l’euro qui, en somme, traduit une forme d’internationalisation des économies. Ils n’épargnent aucun des personnages politiques qui ont conçu ou mis en place la monnaie unique. Ce côté pamphlétaire de leur ouvrage stimulera chez certains lecteurs des passions diverses.
D’autres lecteurs seront peut-être plus circonspects avant de retirer leur confiance à des hommes, comme Jean Monnet, Michel Rocard ou Jacques Delors, traités dans ce livre comme des inconscients qui ignoraient vers quelle catastrophe ils nous entraînaient tous. Mais nous savions déjà, à quelque bord que nous appartenions, que la monnaie unique aurait dû être précédée d’une convergence des économies, de la construction de budgets comparables et de l’adoption de fiscalités identiques ou voisines. Bref, l’Europe a mis la charrue avant les boeufs. Faut-il pour autant attribuer à l’euro tout le chômage, toute la précarité, toute la souffrance de la société française en crise ? On reçoit sans réserve le raisonnement des quatre auteurs : l’euro favorise les nantis plutôt que les pauvres et les banques spéculatrices plutôt que les individus ; la monnaie unique a privé les pays membres de la zone euro d’un certain nombre d’instruments, comme la dévaluation, qui leur auraient permis de juguler la crise plus vite ; l’Allemagne, figée dans son horreur de l’inflation, n’a pas vu que son modèle n’est pas universel et que, à l’universaliser, elle perdrait ses parts de marché.
Donc, vous voyez, "Casser l’euro" dit quelques vérités dont il vaut mieux s’imprégner. Mais, l’euro existe, n’est-ce pas, et comment en sortir ? Les auteurs ne se dérobent pas. Ils s’efforcent, avec sérieux, de nous proposer une solution. Elle est forcément complexe et forcément obscure. Il s’agirait de créer deux euros, un fort pour les pays du Nord de la zone et un faible pour ceux du Sud. Ainsi y aurait-il un euro-franc ou un euro-lire, etc. Ils ne nient pas du tout que cela correspond, pour un certain nombre de pays, à une dévaluation. Et ils en avouent les conséquences négatives sur les prix, sur la valeur des avoirs, et sur la dette publique (dont ils minimisent la hausse inéluctable), mais aussi les effets formidablement positifs sur l’emploi et la croissance. C’est un travail méticuleux et complet.
Un exposé dont l’objectif est louable
On n’éprouve que respect pour un exposé aussi bien construit dont l’objectif est louable : mettre un terme à la récession et au chômage. On objectera toutefois que le projet européen est né de deux guerres abominables. S’il repose sur une utopie, celle-ci n’en est pas moins le moteur d’une politique qui transcende les hommes, de même que les États-Unis d’Amérique n’existeraient pas sans l’utopie qui les a fait naître. Pour sacrifier le projet, au risque de réveiller les vieux antagonismes européens, il vaut mieux savoir, cette fois, vers quoi sa disparition nous conduirait. Bien entendu, une certitude de ce genre n’existe pas. Dans ces conditions, la lente et patiente réforme de ce qui a déjà été mis en place n’est-elle pas préférable ?
(1) Casser l’euro, par Frank Dedieu, Benjamin Masse-Stamberger, Béatrice Mathieu et Laura Raim, Ed. Les liens qui libèrent (LLL) 19 euros.
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