Il y a un mois, trois chercheurs américains ont été récompensés par le Nobel de médecine pour leurs découvertes sur les mécanismes moléculaires contrôlant le rythme circadien. Leur modèle : Drosophila melanogaster.
La mouche du vinaigre avait aussi connu une autre heure de gloire en 2011, quand Jules Hoffmann, entomologiste, avait reçu le Nobel de médecine pour ses recherches sur l’immunité innée chez la drosophile, chez laquelle il avait découvert de nombreux peptides antimicrobiens (PAM). Ces PAM sont prduits par un insecte, quand il est au contact d’un micro-organisme qui traverse son exosquelette. Libérés dans l’hémolymphe, les PAM détruisent le micro-organisme en question.
Des PAM aux molécules de défense
D’où l’idée de les utiliser comme antibiotiques chez l’homme. Des premiers essais concluants avaient conduit Jules Hoffmann à créer la société Entomed fin 1998. « Nous avons d'abord travaillé sur la drosophile puis sur de nombreux autres insectes », raconte Roland Lupoli, entomologiste à Paris-Descartes, auteur de « L’insecte médicinal » (éditions Ancyrosoma), qui a travaillé chez Entomed. « Nous avons par exemple découvert à partir de l’Arlequin de Guyane (Acrocinus longimanus) un peptide antifongique actif chez la souris. Nous avons cependant dû arrêter l’essai en phase I car la production était trop coûteuse. » Mais le potentiel demeure, souligne Roland Lupoli, et il existe un médicament réalisé à base d’un PAM (venant de la mouche Calliphora vicina), l’Alloferon, commercialisé en Russie contre l’herpès.
La société Entomed s’est ensuite tournée vers de petites molécules de défense d’insectes, qui présentent des activités cytotoxiques, et de potentielles propriétés anticancéreuses. Obtenues à partir de récoltes d’insectes, des dizaines de molécules actives sur des cellules cancéreuses humaines en culture ont été isolées. Deux séries de molécules médicaments optimisées ont montré leur efficacité sur des tumeurs solides et sur la leucémie in vivo chez la souris. Ces recherches ont été interrompues en 2005 pour des raisons financières. Mais le potentiel reste entier : en raison de leur nombre (les deux tiers de toute la biodiversité terrestre), les insectes demeurent le plus important réservoir de molécules médicaments « et on a à peine effleuré ce monde », regrette Roland Lupoli.
Entre simple outil et médecine traditionnelle
Les insectes ont aussi leur place, de façon plus indirecte, comme outils de biotechnologie. On utilise ainsi des cellules d’insectes pour produire des molécules thérapeutiques. Certaines ont permis le développement de vaccins (par exemple FluBlOk contre la grippe), ou la production de vecteurs en thérapie génique (Glybera, pour le déficit familial en lipoprotéine lipase). À l’autre bout du spectre, certaines thérapies plus traditionnelles reviennent au goût du jour : les larves de mouche Luciala Sericata permettent la cicatrisation de certaines plaies. On avait observé il y a longtemps qu’elles consommaient bactéries et tissus morts mais elles avaient été abandonnées après la seconde guerre mondiale avec l’arrivée des antibiotiques. « Elles reviennent au goût du jour avec le développement de l’antibiorésistance, et existent maintenant sous forme de pansements, avec des asticots aseptisés et qui ne sont pas vus par le patient », s’amuse Roland Lupoli.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation