Chercheuse au centre de recherche en transplantation et immunologie de Nantes, Carole Guillonneau a reçu le prix France transplant 2016 pour ses travaux sur l'interleukine-34.
Fondée en 1969 par le Pr Jean Dausset, Prix Nobel de médecine et de physiologie, l’association France Transplant a coordonné l’activité de prélèvement et d’attribution des organes aux malades en France pendant 25 ans, avant d'être remplacée en 1994 par l’Établissement Français des Greffes (EFG). Désormais, l'association vise notamment à promouvoir la transplantation et à en expliquer les enjeux aux patients. Cette année, elle a décidé de distinguer Carole Guillonneau, chercheuse CNRS à l’INSERM 1064 à Nantes, pour ses travaux dans le domaine de la transplantation d'organes. « Je travaille depuis quinze ans sur une population de cellules régulatrices, qui a été beaucoup délaissée par la communauté scientifique et qui n'est pas très étudiée : les cellules T CD8 », explique Carole Guillonneau. « J'ai découvert que ces cellules permettaient d'empêcher un rejet de greffe cardiaque chez des rats pourtant incompatibles au niveau de leur complexe majeur d'histocompatibilité (CMH) », détaille-t-elle.
Elle a également identifié une molécule, l'interleukine 34, produite par les cellules CD8. « J'ai poursuivi des travaux focalisés sur cette cytokine pour identifier son rôle et savoir pourquoi elle était produite par les CD8. J'ai pu démontrer que les cellules régulatrices produisaient cette molécule pour empêcher le rejet de greffon », poursuit-elle. En injectant directement la cytokine à un rat, elle a observé qu'on pouvait empêcher à la fois rejet aigu et le rejet chronique du greffon. « On obtient une tolérance indéfinie spécifique et les animaux restent capables de se défendre contre des infections pathogènes, comme la grippe », souligne la chercheuse.
Dépôt de 4 brevets
Forte de ces découvertes, elle a ensuite réalisé des tests avec des cellules humaines. « Nous avons prélevé des cellules sanguines avant transplantation chez des patients, on les a traitées avec de l'interleukine 34 pendant 15 jours et on les a réinjectées dans un modèle de souris humanisée, dotée d'un système immunitaire proche de l'humain. On leur fait une greffe de peau avec des déchets opératoires de peau humaine. Quand on injecte des cellules humaines incompatibles, on a un rejet assez rapide du greffon de peau. Mais si on co-injecte les cellules régulatrices, on est capables d'empêcher le rejet du greffon », précise Carole Guillonneau. Et de même, l'injection directe de la cytokine est capable d'empêcher le rejet de la transplantation de peau.
Ces travaux ont conduit au dépôt de quatre brevets et la chercheuse envisage maintenant de passer au stade clinique d'ici 3 à 5 ans. « Un industriel français qui fait de la thérapie cellulaire serait intéressé pour utiliser l'interleukine 34 pour ses protocoles de laboratoire avant réinjection au patient. Et pour le second volet, l'injection de la cytokine, j'ai un projet de création de société pour développer un produit pour lequel j'ai déposé des brevets », indique encore Carole Guillonneau. Le prix France Tranplant 2016 lui apporte « une visibilité, une notoriété et une reconnaissance » pour la qualité de ses recherches, ainsi que des contacts qui lui permettront d'ouvrir « un champ de possibilités plus large pour les applications de mes travaux », se félicite-t-elle.
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