À l’issue de la manifestation des blouses blanches dimanche 15 mars, qui a mobilisé 19 000 personnes selon la police, entre 40 000 et 50 000 selon les organisateurs, syndicats de médecins et d’internes sont d’accord sur un point : entre les opposants au projet de loi de santé et le ministère, les points de vue ne se sont pas rapprochés. Au contraire, c’est un dialogue de sourds qui s’installe.
La décision de Marisol Touraine d’examiner le texte en procédure accélérée n’est pas de nature à apaiser les esprits (il n’y aura qu’une seule lecture à l’Assemblée et au Sénat, ce qui marque la volonté du gouvernement d’aller le plus vite possible).
Des amendements pour solde de tout compte ?
« Marisol Touraine [qui a reçu une délégation de leaders médicaux après la manifestation] n’a rien annoncé de nouveau », se désole en tout cas Mélanie Marquet, présidente de l’ISNI (internes). « Il ne s’est rien dit de nouveau qu’on ne sache déjà », grince aussi le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.
Le Dr Claude Leicher, président de MG France, nuance le propos. La ministre aurait demandé aux complémentaires de proposer, pour la mise en place du tiers payant, un dispositif commun avec le régime obligatoire (avec flux unique des données et système unique de paiement).
Marisol Touraine a du moins admis dimanche que la réforme « ne se ferait pas sans les médecins », réaffirmant sa volonté de dialogue. « J’ai déposé à l’Assemblée nationale des amendements qui permettent de répondre aux préoccupations exprimées », a assuré Marisol Touraine. Comme prévu, les amendements gouvernementaux annoncés portent (notamment) sur l’organisation des soins dans les territoires, les garanties de paiement pour les médecins dans le cadre du tiers payant (avec pénalités de retard pour l’assurance-maladie) et la vaccination par les pharmaciens (qui sera seulement expérimentée). L’examen du texte débute ce mardi en commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale.
Une nouvelle mobilisation des internes?
Faute de concret, les internes n’excluent pas de sortir à nouveau la hache de guerre. « Nous allons étudier de près les amendements du gouvernement pour voir si les promesses y trouvent leur traduction », précise Mélanie Marquet. Jugeant que les réponses ministérielles ne sont pas à la hauteur à ce stade, les internes songent déjà à un mouvement de grève illimité, qui pourrait être voté « dans les jours qui viennent ».
À MG France, le président Claude Leicher veut lire et analyser les amendements du gouvernement pour voir si ses propositions y sont reprises. « Elles forment un tout, répète-t-il. S’il y manque un seul élément, le virage ambulatoire promis se casse la figure ». « Si nos propositions ne sont pas reprises, la loi Touraine connaîtra le même sort que la loi Bachelot », vidée de sa substance par la loi Fourcade.
Bataille politique
La CSMF invite les médecins à alerter leurs députés sur les dangers que le projet de loi ferait courir au système de santé. « La représentation nationale aura des comptes à rendre aux médecins et aux électeurs », met en garde Jean-Paul Ortiz. Les cadres départementaux et régionaux de la CSMF sont invités à relayer ce mot d’ordre sur le terrain, à quelques jours des élections départementales.
La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) campe sur une ligne dure. Son président Lamine Gharbi exhorte estime que la « méthode Touraine est mise en échec » et appelle au départ de la ministre. Il exhorte les députés et sénateurs à supprimer les dispositions les plus controversées « notamment celles sur le tiers payant généralisé et sur le service public hospitalier ». « À quoi servirait une grande conférence sur la santé une fois le texte voté ? », argumente-t-il.
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