Le ministère souhaite absolument faire retomber la pression autour de la loi de santé. Marisol Touraine reçoit cette semaine plusieurs représentants de la profession, deux semaines seulement avant le début d’un mouvement de grève de probable grande ampleur (praticiens libéraux puis cliniques). Après le président de l’Ordre, mardi, elle s’est entretenue avec MG France et a rendez-vous avec la CSMF ce jeudi.
Cette séquence, déterminante, est censée montrer la volonté d’écoute du ministère de la Santé. « Des compromis sont possibles », répète-t-on. Les premières concessions ont été jugées très insuffisantes par la profession (lire ci-dessous). Et surtout trop floues. Les médecins libéraux ont maintenu leurs mots d’ordre de fermeture des cabinets, et la grève des gardes du 23 au 31 décembre. Les cliniques, elles, cesseront toute activité opératoire à compter du 5 janvier.
Cette radicalisation inquiète l’Élysée. « C’est embêtant, reconnaît-on dans l’entourage de François Hollande. Il y a des vrais sujets de fond, les cliniques, mais il y a aussi beaucoup de stratégie de la part des syndicats de médecins libéraux dans la perspective des élections professionnelles. »
Il n’empêche. Pour la première fois depuis des années, la CSMF, MG France, la FMF et le SML, mais aussi d’autres structures (UFML), ont dénoncé ensemble une loi jugée « liberticide ». Ils réclament (au minimum) la réécriture du texte avant son examen au Parlement (qui pourrait finalement intervenir après les élections cantonales des 22 et 29 mars).
Plusieurs points hérissent la profession. Le service territorial de santé au public reste perçu comme une caporalisation de la médecine libérale. Même si Marisol Touraine s’en défend, les médecins redoutent la fin de la liberté d’installation et du volontariat de la permanence des soins. Le service territorial de santé sera porté par les professionnels et soutenu par les ARS, assure le ministère sans convaincre.
Voie étroite
Le tiers payant généralisé reste la principale pomme de discorde. La promesse ministérielle d’un « système rapide, simple et sécurisé », et sans sanctions pour les médecins,ne convainc pas. Les médecins récusent toute obligation. Mais cette réforme est emblématique de la stratégie nationale de santé...
Les cliniques, elles aussi, restent l’arme au pied, convaincues que le futur service public hospitalier les pénalisera face à l’hôpital. Malgré les ouvertures sur ce dossier (mission de service public pour les cliniques qui accueillent des urgences, dépassements d’honoraires sous conditions), le privé redoute d’être marginalisé dans les autorisations ou renouvellements d’équipement lourds.
La délégation de tâches subie est dernier point conflictuel. La création des infirmières cliniciennes et la vaccination confiée aux pharmaciens ne passent pas. « Nous appellerons au boycott des pharmacies qui vaccineront », a même prévenu le Dr Claude Leicher, président de MG France. La CSMF veut mettre un terme au « démantèlement des métiers ». « Une formation sera proposée et il y aura une articulation avec le médecin traitant », a promis Marisol Touraine devant l’Ordre des pharmaciens. Insuffisant.
À avoir beaucoup attendu, Marisol Touraine se retrouve sur une voie étroite pour amender le projet de loi sans le dénaturer. Et risque de devoir céder davantage.
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