L’inspection générale des affaires sociales (IGAS) a rendu public son rapport sur la situation économique des centres de santé et leur place dans l’offre de soins.
En près de 140 pages, ce document très attendu dresse un tableau complet des quelque 1 220 centres « qui accueillent en général des populations plus précaires que la moyenne nationale des médecins libéraux », ont « une utilité sanitaire et sociale bien réelle », même si « leur efficacité médico-économique ne peut être prouvée ». Ce rapport intervient dans un contexte où les formes d’exercice regroupé et coordonné ont le vent en poupe (les centres de santé dispensant des soins ambulatoires pluriprofessionnels en secteur I et en tiers payant).
Modèle boiteux, mauvaise gestion
Premier constat, « les centres de santé sont financièrement fragiles ». Pour l’IGAS, cette fragilité trouve sa source dans les imperfections de leur modèle économique et de leur gestion dont la rigueur laisse souvent à désirer. « Rares sont ceux qui réunissent les critères de bonne gestion », souligne l’institution, qui décrit un monde éclaté (activités, taille, différences de culture...).
Résultat, de nombreux centres de santé ne doivent leur survie qu’aux gestionnaires (associations, mutuelles, caisses de Sécurité sociale, établissements ou communes) « qui bouclent le budget par une subvention ».
L’IGAS enfonce le clou : « le modèle économique des centres de santé est structurellement boiteux ».
La plupart des centres de santé n’équilibrent pas leurs comptes avec les seules ressources de l’assurance-maladie, insiste le rapport. L’institution relève qu’aucun mécanisme « n’assure la cohérence entre les dépenses et les recettes ».
L’IGAS note aussi que si les dépenses propres à l’exercice regroupé peuvent être financées par une rémunération spécifique (option de coordination), les centres de santé n’y recourent « qu’en petit nombre du fait de sa lourdeur de gestion ». Autre difficulté chronique : la gestion du tiers payant, souvent coûteuse, ne bénéficie d’aucun financement ad’hoc.
Lutte contre l’absentéisme, horaires élargis.
Après le constat, les préconisations. L’IGAS invite logiquement les centres de santé à réaliser « d’importants efforts de gestion » (recettes et dépenses)et d’organisation interne. Ceux-ci supposent un élargissement des horaires d’ouverture, une attention accrue portée au taux de remplissage des plannings professionnels, une maîtrise des dépenses de personnel (notamment administratif) ou encore une application plus stricte des règles de nomenclature. Il serait également urgent de mettre en place un système d’information efficace pour suivre les recettes et dépenses au jour le jour. Quant au tiers payant, le rapport avance plusieurs mesures pour alléger sa gestion (outil de contrôle des droits, formation des agents, référent CPAM...).
Surtout, l’institution recommande « de réduire l’adossement des règles de financement des centres de santé à celle des cabinets libéraux ». Pour l’IGAS en effet, il n’y a aucune légitimité à cet adossement, s’agissant de deux modes d’exercice bien différents. Elle propose donc que le financement du secteur des centres de santé gagne en autonomie en mettant l’accent « sur la part forfaitaire de rémunération ».
Trois étages de forfaits
Sur ce point crucial de réforme, l’IGAS préconise une rémunération forfaitaire spécifique à trois étages, mieux adaptée aux spécificités du modèle des centres de santé. Le premier étage serait un « forfait de gestion regroupée », systématiquement accordé aux centres de santé bien gérés (sur cahier des charges) et qui se substituerait à l’option de coordination (peu utilisée). Ensuite viendrait un forfait de coordination médicale interne et externe (versé par l’ARS); enfin des suppléments versés « au titre des missions d’accompagnement social et de santé publique », cofinancés par les collectivités territoriales et l’ARS.
L’IGAS propose par ailleurs de mettre en place un pilotage stratégique des centres de santé. Pour cela, elle demande le renouvellement de l’accord national signé en avril 2003 entre ces centres et l’assurance-maladie. Elle appelle enfin de ses vœux un développement de la contractualisation entre ces structures et les ARS.
Manque d’audace
Joint par « le Quotidien », le président de la Fédération nationale des centres de santé (FNCS), le Dr Richard Lopez, partage le diagnostic de l’IGAS. Il juge en revanche que ses préconisations en matière de financement « manquent d’audace ». Pour lui, le paiement à l’acte « ne correspond plus à la pratique moderne de la médecine, et encore moins aux centres de santé ». Il souhaite la disparition du paiement à l’acte dans les centres de santé et son remplacement par la signature de contrats d’objectifs avec les ARS, « à l’instar de ce qui se fait pour les établissements médico-sociaux ».
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