Première question à poser pour une personne âgée : à partir de quand envisager une prise en charge de l’ostéoporose ? Les facteurs déterminants sont un antécédent de fracture, des douleurs rachidiennes ou une perte de taille inexpliquées, la prise de médicaments ostéoporogènes comme les corticoïdes et, surtout, une tendance aux chutes itératives.
L’antécédent de fracture récente représente un facteur de risque majeur fracturaire. « Or, il n’est absolument pas pris en compte, puisque parmi les sujets ayant fait une fracture sévère, généralement les plus âgés, 75 à 80 % ne bénéficient pas d’une prise en charge adaptée de l’ostéoporose », déplore le Pr Roland Chapurlat (service de rhumatologie et pathologie osseuse, CHU de Lyon). Par ailleurs, la mesure de la densité osseuse (DMO) est un outil important pour évaluer ce risque fracturaire.
Biphosphonates : des risques surestimés ?
La « contre-publicité » menée autour des effets indésirables des biphosphonates a amené les patients à se préoccuper davantage du risque de nécrose de la mâchoire, pourtant rarissime, que du risque de fracture. Même chez les personnes les plus âgées, il y a peu d’interaction médicamenteuse ou de réelle contre-indication avec cette classe thérapeutique. La principale reste l’altération de la fonction rénale, avec une insuffisance de stade IV ou V.
Qu’il s’agisse d’anti-ostéoporotiques ou de suppléments en vitamine D, on dispose maintenant de traitements à administrer de façon intermittente, qui ne viendront pas s’ajouter à une ordonnance parfois déjà très longue.
Supériorité des ostéoformateurs
Quel que soit l’âge, un traitement est recommandé après une fracture sévère de fragilité si le T-score est < -1. Après une fracture non vertébrale, on préconise en particulier chez le sénior l’acide zolédronique, si la fonction rénale le permet, puisqu’il a fait la preuve de son efficacité à réduire le risque de récidive après fracture de l’extrémité supérieure du fémur. Il faudra préalablement vérifier le statut vitaminique D du patient. Ce traitement parentéral est généralement bien toléré. Un épisode pseudo-grippal peut être prévenu ou contrôlé par du paracétamol, et son intensité tend à s’atténuer avec les injections ultérieures. « Cette délivrance parentérale évite le caractère contraignant des biphosphonates oraux, tout en favorisant l’observance, notamment en cas de troubles cognitifs, et en réduisant le risque d’intolérance digestive », selon le Dr Éric Thomas (rhumatologie, CHU Montpellier).
On modifie actuellement le paradigme de la prise en charge après des fractures vertébrales. Deux essais thérapeutiques menés vs un comparateur actif prouvent la supériorité des ostéoformateurs. Une étude à paraître montre que le tériparatide est plus efficace que le risédronate pour prévenir la récidive fracturaire. Un autre essai montre des résultats comparables avec le romososumab, un Ac monoclonal injectable stimulant la formation osseuse (pas encore commercialisé) vs l’alendronate. « On a suffisamment de données pour affirmer qu’après une fracture vertébrale ostéoporotique, il faut commencer par un ostéoformateur avant de prendre le relais par un anti-résorption. C’est maintenant la séquence de référence, qui vise non plus la stabilisation de la DMO mais un gain densitométrique », souligne le Pr Chapurlat.
Les biomarqueurs sériques pour ajuster
La durée du traitement s’adapte au cas par cas : trois ans pour l’acide zolédronique, cinq ans pour les biphosphonates oraux ou plus en fonction des résultats (T-score au col fémoral restant < -2.5 à la fin du traitement) ou en cas de fracture vertébrale initiale. Cependant, la durée du traitement doit être considérée en fonction de l’état de santé et fonctionnel de la personne âgée. Les biomarqueurs sériques, les télopeptides C terminaux du collagène de type I (CTX), sont surtout intéressants pour évaluer l’efficacité clinique des médicaments et éventuellement pour vérifier l’observance en cas d’ingestion par voie orale. Lorsqu’on envisage l’arrêt d’un traitement par denosumab, susceptible d’entraîner un rebond de la résorption osseuse, les biomarqueurs aident à mieux gérer cette phase, ainsi que le passage obligatoire à un biphosphonate.
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