Vaccination obligatoire, quel bilan un an après ? Posez vos questions au Dr Daniel Lévy-Bruhl (Santé publique France)

Bonjour je suis ravi de participer à ce tchat et je remercie le «Quotidien » de me donner l'opportunité de répondre à vos questions.

On commence à voir les effets positifs de l'extension vaccinale. La couverture vaccinale contre l'hépatite B des enfants nés en 2018 atteint maintenant 98 à 99%. Un autre exemple, la première dose pour le méningocoque C est passée de 39% l'an dernier à 75% cette année.

Aujourd'hui, les données et les études permettent d'être tout à fait rassurés sur l'innocuité des vaccins du nourrisson. D'ailleurs, aucun vaccin commercialisé en France ne contient de dérivés mercuriels. En ce qui concerne l'aluminium, plus de 100 millions de nourrissons sont vaccinés chaque année dans le monde avec des vaccins contenant de l'aluminium et s'il y avait un problème, les données de pharmacovigilance l'auraient identifié.

La vaccination est obligatoire à l'entrée en collectivité. Un enfant non vacciné contre l'hépatite B ne pourra pas être admis en collectivité.

Merci de m'avoir posé la question. Ni Santé publique France ni moi-même n'avons de lien d'intérêt avec des laboratoires pharmaceutiques.

Ce qui est à l'ordre du jour, c'est une réflexion concernant le fait de rendre obligatoires certains vaccins recommandés pour les professionnels de santé du fait de leur couverture insuffisante.

Quand on voit l'épidémiologie actuelle de la rougeole ou des méningites à méningocoque C, ainsi que les données sur la proportion importante de la population qualifiée d'hésitante vis-à-vis de la vaccination, il y avait une certaine urgence à augmenter la couverture vaccinale. Mais, bien sûr, cette décision doit s'accompagner d'actions pour restaurer la confiance afin que l'obligation vaccinale ne soit qu'une mesure temporaire.

L'obligation vaccinale a permis de lever le sentiment que certaines vaccinations du nourrisson qui n'étaient que recommandées n'étaient pas importantes. Elle a aussi montré l'engagement de l'Etat au plus haut niveau en faveur de la vaccination. Ce qui en soi est déjà un élément de restauration de la confiance.

Le bénéfice financier de l'extension de l'obligation vaccinale pour l'industrie pharmaceutique est assez marginal. Par ailleurs, les ruptures de stocks de vaccins sont aussi un problème pour les industriels. Ils se sont engagés effectivement à ce qu'il n'y ait aucune rupture de stock sur les vaccins liés à l'obligation vaccinale.

C'est tout à fait exact. La pharmacovigilance n'a pas pour but d'enregistrer tous les effets secondaires connus des médicaments mais de détecter des effets inattendus et surtout graves. Même, avec des taux faibles de notifications, cette fonction de détection des signaux est assurée par la pharmacovigilance. De plus, la puissance actuelle des bases de données médico-administratives permet de suppléer à ce problème, grâce à des analyses reliant le statut vaccinal à tout un ensemble de pathologies, permettant de détecter d'éventuelles associations nouvelles.

La réflexion débute. Mais il appartient aux politiques de prendre cette décision.

Influencer n'est pas tout à fait le bon terme, car chaque pays est responsable de sa politique vaccinale. Néanmoins, nous essayons de plus en plus de collaborer au sein de l'Europe pour partager les données, les expériences, les compétences, afin d'améliorer nos décisions et de faciliter la gestion, par les médecins, de la prise en charge d'enfants venant d'autres pays. Ce à travers un effort d'harmonisation des calendriers nationaux.

Comme annoncé par la ministre, la Haute Autorité de santé doit dans les prochains mois rendre un avis sur cette question. La ministre se prononcera une fois qu'elle aura cet avis.

Je ne suis pas convaincu que les parents qui n'ont pas fait vacciner leur enfant avec le ROR le feraient plus avec un vaccin rougeole seul. De plus, quel dommage de laisser sans protections ses enfants contre les oreillons et la rubéole.

Merci de mentionner l'existence de ce site qui pour nous est un moyen de vous aider à répondre aux questionnements de votre patientèle. La version grand public rencontre un grand intérêt : plus de 5 millions de connections en 2 ans. Nous venons juste d'ouvrir le volet professionnels de santé. Donc, il est trop tôt pour faire un bilan. Mais on espère qu'il répondra à vos attentes. Il inclut des textes concernant les principales polémiques vaccinales en cours.

La recommandation, c'est de mettre à jour le statut vaccinal pour toutes les personnes nées depuis 1980. Pour celles plus âgées, il n'y a rien à faire : on les considère immunisées par la rougeole. Pour les personnes au statut vaccinal douteux ou inconnu, il ne faut pas hésiter à administrer une ou deux doses de vaccin. Si la personne était déjà immunisée, ses anticorps détruiront l'antigène vaccinal mais il n'y a aucun risque de sur-vaccination. Il n'y a pas d'effet secondaire lorsqu'on administre ce vaccin à des personnes déjà immunisées. Dans la pratique, il faudrait profiter de toute consultation avec des enfants ou des jeunes adultes pour s'enquérir de son statut vaccinal vis-à-vis de la rougeole, et proposer le cas échéant de le compléter.

C'est une lutte à tous les niveaux. Vous êtes en première ligne vis-à-vis de vos patients. Nous essayons de vous aider en particulier avec le site vaccination-infos-services sur lequel vous pouvez renvoyer les parents et la version professionnelle qui vient d'ouvrir et qui devrait permettre de vous fournir les informations scientifiques dont vous avez besoin pour répondre à ces fake news.

La possibilité donnée aux pharmaciens d'administrer certains vaccins s'inscrit dans une démarche de simplification du parcours vaccinal. Les résultats concernant la vaccination grippale semblent montrer que cette mesure rencontre la faveur du public.

C'est bien sûr une mesure très attendue qui améliorera la connaissance par les professionnels et le public de son statut vaccinal, et qui améliorera donc à terme la couverture vaccinale. Les expérimentations menées ont montré que le principal obstacle qu'il reste est la nécessité pour les médecins d'une double saisie en l'absence d'intégration par des logiciels métiers. Des travaux sont actuellement en cours, en particulier au niveau de la CNAM pour résoudre cette difficulté.

Ce qui entretient aujourd'hui l'épidémie, c'est en grande partie les jeunes adultes qui sont nés à une époque où la couverture vaccinale était faible et qui on grandi sans jamais rencontrer le virus ni le vaccin. Les enquêtes de couverture vaccinale que nous menons dans les écoles, les collèges et les lycées montrent que la couverture vaccinale à partir de 6 ans est maintenant très satisfaisante (supérieure à 95 %).

Je vous remercie pour toutes ces questions qui me permettent aussi de garder le contact avec votre réalité et vos contraintes. Je suis relativement optimiste quant au fait que, grâce à nos efforts conjugués, la confiance envers cette intervention qui reste la meilleure arme contre les maladies infectieuses revienne chez nous.